Savez-vous ce qu’il se passe au XIXe siècle, en 1871–1872 à Paris ? Le mouvement littéraire des Parnassiens est victime du cercle de poésie des Vilains bonshommes. C’est le « zutisme », dixit Charles Cros. Arthur Rimbaud, l’Album zutique, c’est lui, Paul Verlaine et d’autres compères qui se rassemblent à l’hôtel des Étrangers pour créer 22 pastiches lors de réunions dévergondées. Ce recueil parodique est plutôt facile d’accès et il vous fera sourire. Vous avez peu de temps ? Sa concision est un atout. Découvrez une œuvre qui sort des sentiers battus.
1 – Un ensemble de pastiches plutôt accessible
Certains occupent ainsi leur temps libre, une autre façon d’envisager les activités créatives : ils élaborent des textes en prenant appui sur d’autres dans le but de les imiter. Pourquoi ne pas essayer à votre tour ?
À ce petit jeu, notre ado turbulent était plutôt doué. Pour preuve, ces 22 textes ancrés dans la fin du XIXe siècle, avec ses références propres à cette période. En effet, quelques mots compliqués, en rapport avec l’époque, jalonnent le recueil comme « Enghien » et l’expression « Enghien chez soi » qui fait allusion à la publicité de cette bouteille d’eau sulfureuse vendue à ceux qui ne pouvaient se déplacer en cure. Rimbaud utilise son évocation dans un but phallique. Vous trouverez également l’utilisation d’« Ibled », le nom d’une marque de chocolat qui n’existe plus et quelques autres. Si vous souhaitez pénétrer plus dans ces textes et l’univers de cet auteur, consultez Le nouveau dictionnaire de Rimbaud de Claude Jeancolas, FVW éditions.
Cependant, on note la présence de formules simples, claires et cinglantes. La tonalité générale est plus que compréhensible. Comme si nous avions affaire à des réparties de gamins qui se chamaillent. Les Vilains bonshommes nivellent par le bas les poèmes que les Parnassiens mettaient sur un piédestal. Bien qu’accessible, ceci n’est pas recommandé pour un bambin. Ces écrits sont grossiers et déconseillés aux âmes sensibles, aux gardiens de la morale et de l’éthique. La volonté de choquer prime ici.
👉 Ceci dit, si vous n’avez pas froid aux yeux, suivez ce lien pour voir tous les bénéfices de l’insulte.
2 – Une littérature insolente pour se divertir
Il ne faut pas s’offusquer des dérives verbales, scatologiques et autres de ce recueil. La virtuosité ici consiste à démanteler les textes originaux, oubliés sans ces pastiches. Cette parodie aisée est une invitation à rigoler un bon coup aux dépens de ces auteurs humiliés. Il est intéressant dans ce cas précis de constater que la poésie est rebelle, grivoise, ordurière, mais pourtant toujours évocatrice et rythmée. Les formes poétiques comme les sonnets (2 fois 4 vers suivis de 2 fois 3 vers) et autres dizains des poètes d’alors y ont la vie dure. Ces écrits font sourire et c’est déjà beaucoup : nombre de poètes nous ennuient et se complaisent dans l’intellectualisme forcené. Les textes sont frais. La jeune prose déborde de vie. L’écriture est déjantée et pleine d’humour. Elle détruit les conventions. C’était ça les soirées entre copains à l’époque. 🥳 Pour se divertir, on se réunissait et on refaisait le monde, à commencer par la poésie !
3 — Un recueil satirique court et vite lu
Oui, la plupart de ces textes sont relativement courts. Le recueil ne fait que quelques pages. Les écrits sont aérés. C’est parfait pour une petite pause littéraire. On est dans la légèreté même si cela reste une critique virulente des poètes parnassiens entre 1871 et 1872. Parmi les plus brefs sont Conneries 1 et Conneries 2. Vous voyez : déjà rien qu’au titre la portée subversive de ces derniers. Lys est un quatrain, vous trouverez également 1 vers isolé : n’ayez pas peur, ça ira vite ! On est loin des concours de longueur que faisait Arthur Rimbaud aux écrits de Victor Hugo.
👁 Pour ceux qui pensent passer trop de temps à lire un ouvrage, consultez les conseils de lecture rapide. Cette compilation de textes filera comme une lettre à la poste ! Le plus long est en fait Les remembrances du vieillard idiot qui atteint des sommets de provocation à l’égard de Coppé.
4 — 22 textes inouïs d’Arthur Rimbaud : l’Album zutique
Au commencement l’Idole, Sonnet du Trou du Cul, un pastiche de ce pauvre Albert Mérat, donne le ton à tout l’ouvrage : il ne faut pas avoir froid aux yeux et s’attendre à voir ce dont on n’a pas l’habitude. En effet, chacun des poèmes détonne et après lecture on a conscience d’avoir eu sous nos yeux un OVNI du genre littéraire. Chaque texte vous surprendra à sa façon. L’Album zutique de Rimbaud est un véritable défi pour les lecteurs les plus conservateurs. Il bouscule les conventions de la poésie en proposant des images surprenantes et des métaphores sauvages. Le poète défie les normes et les traditions pour explorer de nouveaux territoires littéraires.
Les poèmes sont souvent provocants et audacieux, mais c’est justement ce qui rend ce travail d’écriture ✍️ si intéressant et unique. Les 22 textes de Rimbaud sont une invitation à s’aventurer dans un monde incroyable de mots et de poésie. Il n’y a rien de plus excitant que de découvrir l’univers décalé et surprenant d’Arthur.
Pour toutes ces bonnes raisons, lisez ce recueil même si certaines parties vous sembleront obscures du fait de leurs références à l’actualité d’alors. Vous passerez un moment distrayant, c’est bon pour le moral.
👉 D’ailleurs, suivez ce lien : pour vous soigner par la littérature.
Vous aurez alors peut-être la possibilité de changer d’état d’esprit par rapport à la poésie en général, qui est souvent perçue ennuyante et triste, pour une vision plus rock’n’roll de cette dernière. N’attendez plus et foncez le découvrir !
Aurélien Perret, pour e-Writers.
Article relu par Périne, tutrice de formation chez FRW.
Sources :
Arthur Rimbaud Œuvre-Vie, par Alain Borer, Arléa,1991.
Le nouveau dictionnaire Rimbaud, par Claude Jeancolas, FVW, 2012.
Arthur Rimbaud Paul Verlaine Un concert d’enfers Vies et poésies, Solenn Dupas, Yann Fremy et Henri Scepi, Quarto Gallimard,2017.