Les temps ont bien changé ! Au grand bonheur des femmes qui dévoilent leurs atouts en toute sérénité. Pourtant, la religion a longtemps caché la beauté du corps féminin, symbole de séduction et de débauche. Face aux croyances démodées, la révolte s’organise : c’est le siècle des Lumières. Véritable modèle d’émancipation, cette philosophie célèbre les plaisirs sensuels. De nombreux talents rejoignent le mouvement et créent des peintures incroyables. Une nouvelle ère révolutionnaire est en marche. Découvrez vite 5 œuvres d’art scandaleuses très déroutantes !

« Couvrez ce sein que je ne saurais voir. Par de pareils objets les âmes sont blessées, et cela fait venir de coupables pensées. »

Molière, Le Tartuffe ou l’Imposteur (1669), Acte III, Scène 2

 

1. L’Odalisque de François Boucher : une invitation osée à la luxure

 

Femme à moitié nue, allongée en position lascive.

L’Odalisque. Auteur : François Boucher. Source image : photo (C) RMN-Grand Palais (Musée du Louvre) / Tony Querrec

 

En 1745, il faut être sacrément culotté pour réaliser une telle œuvre ! Celle-ci nous entraîne dans un boudoir intimiste à la décoration élégante. Sur les coussins moelleux et les tissus froissés, une femme nous observe, le postérieur à l’air. Ce dernier étant positionné en plein milieu du tableau, impossible de le rater ! Ce face à fesses pour le moins inattendu est renforcé par le regard insistant de notre muse. Le message est clair, elle nous invite à la rejoindre.

François Boucher s’amuse à faire du spectateur un voyeur (malgré lui) en exprimant sa vision sans détour du plaisir. Inspiré par l’orientalisme, il conçoit une odalisque absolument outrageuse. Malgré la contestation, elle remporte un énorme succès.

Eh oui ! Au XVIIIe siècle, on sait déjà faire le buzz !

2. Le Verrou de Jean-Honoré Fragonard : le sens caché d’une œuvre d’art scandaleuse

 

Étreinte amoureuse d'un couple dans une chambre.

Le verrou. Auteur : Jean-Honoré Fragonard. Source image : photo (C) RMN-Grand Palais (Musée du Louvre) / Stéphane Maréchalle

 

Mais que se passe-t-il ici ? À première vue, la scène est explicite. Un homme en sous-vêtements pousse un verrou. Il tient fermement sa maîtresse, qui semble vouloir lui échapper. La lumière projetée sur le couple, à la manière d’une pièce de théâtre, accentue l’action. Le décor truffé de métaphores érotiques est plongé dans la pénombre. Sur le lit défait, deux oreillers prennent l’aspect d’une poitrine généreuse. Le coin saillant du lit dévoile un genou plié, partie du corps extrêmement sensuelle à l’époque. La pomme, symbole du péché, représente la relation jugée impure.

Regardez de plus près les drapés rouges. Ne sont-ils pas étranges ? Les plus observateurs remarqueront qu’ils dessinent un sexe féminin à droite et un phallus à gauche. Un autre détail nous interpelle : le désordre. Les objets renversés attestent d’un conflit récent. Le visage paisible de l’amante, en contradiction avec sa posture corporelle, pose question. Est-elle consentante ? Feindre la résistance est un jeu répandu au XVIIIe siècle. Un passe-temps que le peintre a probablement voulu représenter.

Jean-Honoré Fragonard, maître du courant artistique libertin, n’a jamais commenté sa toile finalisée en 1780. Son sens exact reste donc un mystère.

3. Et nous aussi nous serons mères ; car… ! de Jean-Jacques Lequeu : le sein Graal

 

Religieuse qui soulève son voile faisant apparaitre un sein.

Et nous aussi nous serons mères ; car…! Auteur : Jean-Jacques Lequeu. Source image : BNF

 

Dénoncer les pratiques spirituelles démodées, en voilà une quête difficile ! Or, la Révolution française provoque un vent de rébellion, mettant les habitudes de l’Ancien Régime à rude épreuve. Cette œuvre à caractère profane de 1794, en est l’exemple parfait. Une nonne pas très catholique soulève son voile, nous révélant son décolleté. Au-delà du fantasme de la religieuse dévergondée, la réussite de ce beau portrait réside dans son message : les bonnes sœurs peuvent aussi se marier et avoir des enfants.

Dessinateur doué et architecte raté, Jean-Jacques Lequeu se tourne vers la production de dessins anatomiques crus, dévoilant son obsession sexuelle. Malgré son envie de reconnaissance, il finira sa vie pauvrement et ne connaîtra le succès qu’après sa mort.

 

4. Le déjeuner sur l’herbe d’Édouard Manet : la réalité toute crue

 

Femme nue déjeunant avec deux hommes habillés dans une forêt.

Le déjeuner sur l’herbe. Auteur : Édouard Manet. Source image : photo (C) RMN-Grand Palais (Musée d’Orsay) / Benoît Touchard / Mathieu Rabeau

 

Tiens, encore une dame toute nue qui nous dévisage ! Pas très original, me direz-vous. Néanmoins, cette femme, dépourvue de vêtements et déjeunant avec deux hommes habillés, bouleverse les figurations habituelles. Grâce à ses traits expressifs et à sa silhouette réaliste, la demoiselle paraît presque vivante. L’œuvre d’art scandaleuse affole le Tout-Paris qui a le sentiment d’observer l’interdit. Autre innovation : les dégradés ne sont plus à l’honneur, mais sont remplacés par des contrastes vifs et tranchés. Édouard Manet paye les conséquences de son originalité. En 1863, sa toile est recalée par le jury du Salon, lieu d’exposition situé au Louvre du XVIIe au début du XIXe siècle. Toutefois, elle est exposée au Salon des refusés la même année et fait un triomphe auprès des jeunes artistes qui la considèrent comme avant-gardiste.

 

5. Le sommeil de Gustave Courbet : un goût exquis de provocation

 

Femmes totalement nues s'enlaçant sur un lit.

Le sommeil. Auteur : Gustave Courbet. Source image : photo (C) RMN-Grand Palais / Hervé Lewandowski

 

Scandale chez les puritains ! La bonne société du XIXe siècle est affolée à la vue de ce blasphème. Et pour cause, déjà dans les mythes grecs, la représentation de la femme préoccupe. Seule l’épouse aimante est considérée comme un modèle de vertu. Du fait, on imagine facilement la gêne ressentie par les badauds en découvrant ces deux femmes en position délicate. Mais ce n’est pas tout : la méthode utilisée fait aussi débat. La précision apportée à la chair et aux courbes des corps est inouïe.

En 1866, Gustave Courbet réalise la commande pour le collectionneur Khalil-Bey, qui deviendra également propriétaire de la controversée Origine du monde. Très prolifique, le leader du réalisme, reste une référence majeure en la matière.

⏩ En peinture comme en littérature, l’impertinence est partout ! La preuve avec un article à lire sans modération : pourquoi faut-il dévorer l’album zutique si décrié d’Arthur Rimbaud en 4 points essentiels.

La fin de l’autorité exclusive et tyrannique de l’Église a sonné. Comme le dénonce Molière dans Le Tartuffe et l’Imposteur, l’hypocrisie des dévots n’a plus sa place. Une nouvelle façon de penser se développe, portée par les Lumières, dont l’idéologie d’égalité et d’affirmation de soi, est libératrice. Finie l’oppression, l’heure est à la défiance ! On expose sans réserve la nudité à la vue de tous. Jusqu’alors soumise au dogme religieux, la peinture devient plus percutante. De nos jours, elle continue à interpeller et à faire réfléchir. Certaines tendances sont même particulièrement inattendues, comme le dessin intuitif aux propriétés bienfaitrices. L’art n’a donc pas fini de nous étonner !

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Audrey Kerinec-Bleas, pour e-Writers.
Article rédigé lors du cursus de formation en rédaction web chez FRW.
Article relu par Jade, tutrice de formation chez FRW.

Sources :

https://art.rmngp.fr/fr
https://www.bnf.fr/fr
https://www.nasjonalmuseet.no /en/
https://musees-reims.fr/oeuvre/l-odalisque
https://collections.louvre.fr/
https://www.musee-orsay.fr/fr
https://panoramadelart.com/analyse/le-verrou
https://www.cairn.info/revue-etudes-2019-2-page-103.htm&wt.src=pdf
https://cercornum.univ-st-etienne.fr/reni/et-nous-aussi-nous-serons-meres-car
https://www.petitpalais.paris.fr/sites/default/files/content/press-kits/dp_lequeu_fr.pdf
https://www.musee-orsay.fr/fr/oeuvres/le-dejeuner-sur-lherbe-904
https://www.petitpalais.paris.fr/oeuvre/le-sommeil