Vous faites partie de ces enseignants qui sont usés, démobilisés ou en burn-out ? Vous aimeriez quitter l’enseignement, ce métier qui, jadis, était votre vocation, pour commencer une nouvelle carrière plus en adéquation avec vos aspirations ? Certes, envisager une reconversion professionnelle et une démission fait peur. Mais des solutions existent pour vous réorienter. Voici 10 pistes pour sortir de l’Éducation nationale.
« Ceux qui partent sont ceux qui peuvent partir ! Sur la soixantaine d’enseignants démissionnaires que j’ai interviewés, seuls deux avaient franchi le pas sans filet de sécurité. » Sandrine Garcia, sociologue, auteure de Quand les enseignants claquent la porte, La vie des idées, 2021
Opérer une réorientation professionnelle pour sortir de l’Éducation nationale
Vouloir quitter l’Éducation nationale est une chose. Savoir dans quel domaine se réorienter en est souvent une autre. Sélectionner une formation, évaluer les compétences remobilisables, tester une nouvelle activité sont autant de pistes pour faire le point et ouvrir des perspectives. Voici trois premières solutions pour trouver votre voie.
Faire un bilan de compétences
Si vous doutez de votre capacité à vous lancer dans un nouveau projet, réaliser un bilan de compétences dans un centre spécialisé peut être une étape intéressante. Celui-ci va vous permettre de :
- renouer avec vos aspirations réelles ;
- redéfinir vos priorités, vos choix de vie ;
- prendre du recul et recenser les compétences et connaissances acquises et pouvant être réinvesties dans votre projet.
Sachez que vous pouvez réaliser ce bilan en toute indépendance, à vos frais, ou le faire financer par votre Compte Personnel de Formation.
Mobiliser votre Compte Personnel de Formation (CPF)
Le CPF permet aux fonctionnaires d’acquérir chaque année des droits à la formation. Il concerne tous les agents, titulaires ou non du secteur public et les personnels en contrat aidé ou d’apprentissage du secteur privé.
Dans le cadre d’une reconversion professionnelle, c’est une bonne alternative pour préparer votre sortie de l’Éducation nationale, à condition de choisir une formation éligible. Or, pour l’être, celle-ci doit forcément viser l’acquisition d’un diplôme, d’un titre, d’une qualification ou développer des compétences et s’inscrire dans le cadre soit :
- d’un projet d’évolution professionnelle ;
- d’un concours ou d’un examen ;
- d’une VAE (Validation des Acquis de l’Expérience) ;
- d’un bilan de compétences.
Sa mobilisation passe par une demande écrite à votre administration et peut nécessiter 2 mois de délai avant réponse.
Oser le cumul d’activités
Vous avez des centres d’intérêt annexes qui pourraient être lucratifs et conduire à un changement de métier ? Vous pouvez, sous certaines conditions, tester la viabilité de votre projet en exerçant une activité soit :
- Accessoire, comme salarié ou micro-entrepreneur, en dehors des heures de services, de manière régulière ou occasionnelle mais limitée dans le temps.
- Privée lucrative, sous forme d’emploi permanent, à condition d’obtenir un temps partiel sur autorisation (2 ans, renouvelable 1 an).
Les activités autorisées — non concurrentes et non contraires aux bonnes mœurs — peuvent être exercées librement et ne nécessiter qu’une déclaration (production des œuvres de l’esprit), ou occasionner une demande d’autorisation.
Solliciter un détachement de l’Éducation nationale
Obtenir un détachement est un autre moyen de changer d’orientation professionnelle, mais il faut respecter une équivalence de catégorie ou de niveau. Parmi les nombreuses options, il vous sera possible de :
- devenir délégué MGEN ;
- exercer un mandat syndical ;
- travailler pour une administration ou un établissement de la fonction publique hospitalière, territoriale ou d’État ;
- enseigner ou exercer à l’étranger (ONG, institution européenne, parlement) ;
- vous engager (armée française, réserve opérationnelle) ;
- accomplir un stage dans un nouveau corps ou préparer un concours donnant accès à un emploi public.
Sachez que l’ABES (Agence Bibliographique de l’Enseignement Supérieur) publie régulièrement des offres d’emplois accessibles au détachement et que les professeurs disposent de beaucoup de compétences transférables et adaptées.
Recourir à des congés provisoires ou transitoires pour quitter l’enseignement
Si 83 % des profs déclarent exercer leur métier avec plaisir, 46 % d’entre eux avouent avoir déjà été en situation de burn-out (sondage Ifop pour la Fondation Jean-Jaurès, février 2021). Et c’est sans compter les nombreux et récurrents arrêts maladie, qui font souvent figure d’antichambre des démissions. Deux congés peuvent constituer des transitions vers une sortie définitive de l’Éducation nationale.
Faire appel au congé longue maladie
Le CLM est accordé en cas de maladie sans gravité particulière mettant toutefois le fonctionnaire dans l’impossibilité d’exercer. Il faut le solliciter auprès de votre supérieur hiérarchique avec deux certificats établis par votre médecin ou spécialiste :
- L’un, dit « administratif », doit simplement attester que votre maladie justifie la demande ; il respecte le secret médical et ne divulgue rien de votre situation.
- L’autre, destiné au comité médical, doit être détaillé et cacheté sous pli confidentiel.
Le CLM est accordé pour 6 mois ou 1 an et renouvelable jusqu’à 3 ans. Vous conservez l’intégralité de votre salaire durant 1 an, puis passez à demi-traitement. Cependant, sachez que la MGEN verse généralement un complément de revenus aux adhérents à sa mutuelle.
Opter plutôt pour un congé longue durée
Le CLD peut être demandé en première instance, en cas d’affection grave (tuberculose, cancer, poliomyélite, déficit immunitaire grave et acquis). Mais il peut l’être également à l’issue de la première année d’un CLM, notamment dans les cas de burn-out ou de dépression, généralement associés à des « maladies mentales ».
Ses conditions d’obtention sont les mêmes que le CLM Sa durée peut atteindre 5 ans (8 en cas de maladie professionnelle) et son avantage est un plein traitement assuré pendant 3 ans.
Le congé longue durée est considéré comme période d’activité pour les droits à avancement et la retraite. Cependant, il entraîne la perte de votre poste et vous oblige à repasser au mouvement si vous souhaitez ensuite reprendre l’enseignement (et êtes apte). Si jamais vous étiez déclaré inapte, vous pourrez être :
- reclassé sur un autre emploi ;
- mis en disponibilité ;
- admis à la retraite pour invalidité.
Demander une mise en disponibilité pour cesser d’enseigner
Vous n’êtes pas souffrant et ne pouvez prétendre à un congé maladie ? Il vous est possible de solliciter une autorisation d’absence sans traitement pour des raisons exceptionnelles : c’est la mise en disponibilité. Elle peut être accordée d’office pour raison de santé, être accordée de droit pour :
- élever un enfant de moins de 12 ans ou donner des soins à un proche ;
- suivre son conjoint à l’étranger ;
- exercer un mandat d’élu local ;
- se rendre à l’étranger dans le cadre d’une adoption.
Elle peut aussi être sollicitée en cas de :
- reprise d’études ou de recherches (3 ans, renouvelable 1 fois) ;
- convenances personnelles (3 ans, renouvelable, 10 ans maximum) ;
- création ou reprise d’une entreprise (2 ans, en respectant les règles déontologiques cf. article 87 de la loi n° 93-122 du 29 janvier 1993 et décret n° 2007-611 du 26 avril 2007).
La mise en disponibilité est accordée sur demande adressée à l’inspecteur d’académie ou au recteur. Hormis les situations où elle est de droit ou statuée d’office, son acceptation dépend de l’avis des commissions administratives paritaires et des nécessités de service. Mais, évidemment, vous ne cotisez plus pour votre future pension et vous suspendez toute promotion.
Plus judicieuse que la démission, elle est une bonne alternative pour sortir en douceur de l’Éducation nationale et vous essayer à d’autres secteurs d’activité tout en vous ménageant la possibilité de revenir vers vos fonctions initiales.
Pour organiser efficacement votre départ et gérer vos idées de projet, pensez à tester la méthode du Bullet Journal !
Quitter l’Éducation nationale définitivement
Démissionner
Peut-être le divorce est-il consommé et votre lettre de démission déjà rédigée ? Là encore, il vous faudra l’adresser à votre inspecteur d’académie ou au recteur. Sachez toutefois que cette demande peut être refusée. Vous aurez alors la possibilité de faire appel auprès d’une commission administrative paritaire. Mais attention, selon les académies, les délais peuvent être brefs ou au contraire très longs et atteindre parfois 4 mois environ pour la réponse. Si acceptation, 4 mois encore sont à prévoir avant de pouvoir ranger définitivement votre cartable et sortir de l’Éducation nationale.
Engager une rupture conventionnelle
Option plus souple que la démission et le licenciement, la rupture conventionnelle offre une possibilité de départ à l’amiable pour les fonctionnaires et les agents en CDI. Elle suppose un accord des deux parties et ouvre sur une indemnité et des allocations chômage. Seul hic, 76 % des demandes ont été refusées en 2020. En effet, les services académiques évaluent les cas en fonction de la rareté de votre spécialité, votre ancienneté et votre projet.
Elle se demande par courrier recommandé avec accusé de réception envoyé à votre institution et occasionne un entretien pour s’accorder sur les conditions de votre rupture (montant de l’indemnité, date de cessation). Vous pouvez faire des simulations de vos droits.
Abandonner son poste ?
Votre mise en disponibilité a été refusée ? Votre démission aussi ? Certains profs dépourvus de solutions optent pour l’abandon de poste. Mais attention ! En plus de présenter un obstacle pour un éventuel réemploi au sein de la fonction publique, vous ne pourrez prétendre ni au chômage, ni aux congés payés. À éviter, donc.
Franchir le pas pour quitter l’enseignement et se réorienter professionnellement est, par conséquent, tout à fait possible. Suivant votre situation, de nombreuses voies sont ouvertes, transitoires et progressives (congés, mise en disponibilité, cumul d’activités) ou radicales (rupture conventionnelle de contrat, démission). Quoi qu’il en soit, prenez le temps de la réflexion, n’hésitez pas à consulter le site du gouvernement et à vous faire accompagner par un syndicat ou une association comme Aide aux profs, afin de connaître vos droits et sortir de l’Éducation nationale par la bonne porte.
À lire également, le très intéressant article de Nancy Martins : Quitter son emploi : les étapes pour réussir sa reconversion
Isabelle Petitjean – Vos Mots Justes, pour e-Writers
Article rédigé lors du cursus de formation en rédaction web chez FRW.
Article relu par Élodie, tutrice de formation chez FRW.
Sources :
CPF : https://www.fonction-publique.gouv.fr/compte-personnel-de-formation-cpf