Victime symbolique du réchauffement climatique, l’ours polaire est en danger. Selon une étude parue dans Nature Climate Change, il pourrait disparaître de la banquise d’ici à 2100. Le prédateur du Grand Nord est également classé vulnérable depuis 1982 sur la liste rouge de l’IUCN ou Union Internationale pour la Conservation de la Nature. Pour quelles raisons ce grand mammifère est-il tant menacé ? Dans cet article, découvrez tous les éléments qui rendent si compliquée la survie de l’espèce d’ours en voie de disparition.

1 — La fonte des glaces, cause principale du déclin de l’écosystème du géant blanc

La banquise réduit dangereusement

Nommé Ursus maritimus par les scientifiques, l’ours de mer vit dans les eaux couvertes de glace de l’Arctique circumpolaire. Mais avec des températures plus élevées dues aux changements climatiques, son habitat réduit dangereusement. Avec 14 % de diminution de l’étendue de la mer arctique entre 1979 et 2011, la fonte de glace a progressé bien plus rapidement que ce que projetaient les modèles climatiques. Si la perte de banquise se poursuit à ce rythme, la population de l’ursidé pourrait diminuer de plus de deux tiers au milieu du 21ᵉ siècle.

La malnutrition, une conséquence due au manque de surface glacée

Ce grand carnivore se nourrit exclusivement de mammifères marins, dont le phoque. Un individu adulte aurait besoin de 50 à 60 loups de mer par an pour survivre.
Or, en période estivale, la banquise peut fondre complètement dans certaines zones, ce qui oblige le spécimen à passer plusieurs mois dans les terres. À défaut de pouvoir pêcher, il se nourrit d’oiseaux, de poissons, de végétations et de varech, mais ces proies ne lui donnent pas assez d’apports nutritionnels. Il jeûne donc principalement et puise dans ses réserves de graisse jusqu’au retour du gel.
Des chercheurs ont démontré que la cause principale de mortalité chez l’ourson était le manque de nourriture ainsi qu’un lait maternel trop pauvre en graisse. On peut ajouter à cela quelques cas de cannibalisme par des mâles qui ne trouvent plus de quoi s’alimenter.

La reproduction de l’ursidé aggravé par la perte de territoire

Le taux de reproduction de l’ours polaire est le plus faible de tous les mammifères. Pour cause, les femelles ont une maturité sexuelle tardive (environ 4-5 ans), des portées de petite taille et un investissement maternel élevé.
Avec la réduction des surfaces glacées, la période de chasse se raccourcit et leur état de santé décline. Par ailleurs, l’implantation et le développement de l’embryon peuvent être compromis si la femelle est en mauvaise santé.
Les scientifiques ignorent comment les changements de climat vont nuire aux lieux de mise bas, mais la diminution et la disponibilité de glace contraignent sérieusement l’accès à ces lieux traditionnels et seront préjudiciables pour l’espèce.

L’accroissement des maladies favorisées par le réchauffement climatique

Même si l’apparition de maladies et de parasites est rare chez l’ours du pôle nord, la hausse des températures de la région pourrait influencer l’exposition de l’animal à de nouveaux agents pathogènes et des épidémies. Le développement de ces parasites dans les organismes marins est une conséquence directe d’un temps plus chaud et humide. Plus la terre se réchauffe, plus l’émergence de nouveaux agents pathogènes dans le cercle polaire augmente. L’espèce au système immunitaire, naïf, se nourrit principalement de mammifères aquatiques, et le rend donc vulnérable aux infections.

Photographie d'un ours blanc sous l'eau

2 — La pollution, une menace pour l’espèce d’ours en voie de disparition

Les dépôts de polluants organiques empoisonnent l’air et l’eau

Les polluants organiques persistants (POP) atteignent les régions arctiques via les transports aériens et océaniques. Leurs particularités, c’est qu’ils se dégradent peu ou pas. L’exposition à ces produits chimiques chlorés (mercure, plomb, hydrocarbures, pesticides…) peut entraîner des risques cancérigènes, immunodépresseurs et reproducteurs.
Les phoques annelés, barbus et du Groenland, principale nourriture du prédateur, sont touchés directement par cette pollution océanique. Ce qui expose l’espèce à une absorption élevée de polluants. La vulnérabilité des oursons, nourris par un lait contaminé, inquiète les scientifiques sur les effets pour son organisme à l’avenir.

Le développement des exploitations pétrolières et gazières, une nuisance environnementale destructrice

Selon un article paru sur Le monde, on recense 599 sites d’exploitations, dont 222 en activité dans l’arctique. En 2020, 4 milliards de barils de pétrole ont été produits. Un chiffre élevé puisqu’il correspond à 1,3 milliard de gaz à effet de serre rejetés dans l’atmosphère, soit trois fois plus que les émissions de la France. Outre sa pollution dans l’air, le déversement de pétrole dans la banquise soumet directement l’ours polaire à des conséquences mortelles lorsqu’il ingère ses proies.
Avec la croissance de ces sites de production, l’homme est de plus en plus présent sur le territoire. Dans la mesure où l’animal sauvage est très sensible aux odeurs et aux sons, cela augmente les rencontres négatives entre humains et ours.

Les microplastiques perturbent la biodiversité nordique

La pollution au plastique est présente aussi dans la mer de Glace. Des chercheurs allemands ont voulu la quantifier : l’un des échantillons recueillis contenait 12 000 microparticules de cette macromolécule par litre d’eau gelée.
Ils ont également détecté dix-sept formes du polymère, que l’on retrouve dans des produits de la vie quotidienne comme le vernis à ongles, les filtres à cigarettes, les peintures, les emballages, les bouteilles, etc.
Ces particules microscopiques contaminent l’arctique. En effet, elles peuvent flotter à la surface de l’eau ou même couler jusqu’à se déposer dans les profondeurs. De ce fait, les biologistes constatent des effets néfastes sur les animaux marins et notamment les ours, qui en absorbent en grande quantité.

3 — La chasse, une activité qui met l’ours polaire en danger

Le prédateur de phoque à la fourrure neigeuse est chassé pour sa chair, sa peau, ses griffes et ses dents. Dans certains pays comme l’Alaska, la Russie et le Groenland, cette activité est autorisée pour permettre aux autochtones de se nourrir. Mais il n’est pas seulement abattu à des fins de subsistances, il est également victime de la chasse aux trophées. Cette pratique récréative, visant à traquer l’animal jusqu’à épuisement avant de le tuer, se déroule principalement dans la région Arctique du Canada depuis 1940, car elle y est légale. Un passe-temps très controversé qui attire néanmoins un grand nombre d’amateurs de chasse. Au vu de cette demande croissante, de nombreuses agences de tourisme canadiennes et américaines proposent leurs services à prix d’or pour organiser ces safaris. Une nuisance majeure, car le choix des participants qui se livre à ce sport se porte sur de grands mâles sains, forts et en bonne santé, laissant les plus faibles transmettre leur génétique.

Ole J Liodden, photographe et auteur de Polar bears & Humans, a analysé et étudié sur le terrain, les dangers qui menacent l’espèce durant quatre années. Depuis 1960, plus de 50 000 ours polaires ont été tués par des chasseurs, soit les deux tiers de la population actuelle. Dans son ouvrage, le norvégien averti que la survie du géant blanc est autant menacé par le climat que par la chasse. Pour exemple, le Svalbard, qui a interdit tout abattage depuis 1980. Cet archipel, situé au nord de la Norvège, garde une population d’ursidé stable malgré la perte de 50 % de banquise depuis 1980. En effet, ces îles dénombraient 264 ours en 2015 contre 241 en 2004. Un modèle d’avenir pour la communauté scientifique.
En raison d’une forte demande sur le marché mondial, le commerce international joue aussi un rôle essentiel. Ainsi, les différentes parties du spécimen sont exportées dans le monde entier. Une peau polaire peut se vendre jusqu’à 85 000 €.

En 2013, la Convention sur le commerce international de faunes et flores sauvages menacées d’extinction (CITES) a refusé une proposition de loi des États-Unis visant à interdire la commercialisation de l’ours blanc. Pourtant, l’organisme reconnait que 400 à 500 bêtes sont vendues chaque année.
À tout cela, s’ajoute le trafic illégal qui sévirait principalement dans l’est de la Russie, selon un rapport récent, elle toucherait 100 à 200 mammifères blancs par an.

« Les chasseurs de trophées tuent les plus gros animaux, en supprimant les gènes nécessaires pour l’aider à survivre au réchauffement climatique. » Interview de Joe Liodden pour Mirror


Il a été déterminé que 19 sous-populations d’ours polaire composent l’estimation mondiale. Elles se répartissent sur environ 24 000 000 km², il est donc difficile d’avoir des données exactes quant au statut de conservation de l’espèce. Sans compter que son hybridation avec le grizzly (nommé pizzly ou grolar) apporte une complication supplémentaire. En effet, avec la hausse des températures, le géant blanc remonte vers le nord et l’ours brun descend un peu plus vers le sud. Une rencontre pas si anodine puisque ces croisements pourraient bien compromettre également la survie du mammifère. Le principal danger ? Que le pizzly devienne plus présent que son homologue dans le secteur nordique.
Les experts ne parviennent pas à se mettre d’accord sur les menaces majeures qui pèsent sur leur disparition. Bien que les risques et l’impact biologique soient compris, les plans d’interventions sont peu nombreux. Mais la communauté scientifique s’accorde à dire que si davantage de mesures restrictives ne sont pas prises rapidement, alors l’extinction de la race sera irréversible dans les prochaines décennies.

Marine Monziliard, pour e-Writers
Article rédigé lors du cursus de formation en rédaction web chez FRW.

Article relu par Carine, tutrice de formation chez FRW.

Sources :

Étude de l’IUCN, ours polaire

Arctique : présence record de microplastiques dans la banquise, National Geographic

Environnement : gare au pizzly !, Le Parisien

Hunting of polar bears must be banned if species has any chance of survival, expert warns, interview de Ole Liodden pour Mirror