Vivre avec un trouble alimentaire, que ce soit l’anorexie, la boulimie ou l’hyperphagie boulimique, plonge les malades dans un profond désarroi psychologique. En effet, leur quotidien est extrêmement impacté par un mal-être constant qui touche non seulement l’alimentation, mais aussi leur poids et la représentation de leur image corporelle. La souffrance psychique de ces patients est parfois telle qu’elle les pousse à un isolement total. Cet article se veut révélateur du quotidien de celles et ceux qui ont un TCA, mais aussi des solutions existantes.

Vivre avec un trouble alimentaire : quid du quotidien des malades ?

L’anorexie

L’anorexie est un trouble rare des conduites alimentaires caractérisé par des restrictions drastiques de nourriture, une peur intense de grossir et une dysmorphophobie marquée.

anorexique miroir dysmorphophobie

Illustration issue du journal El Diari de l’Educacio
L’anorexie et la dysmorphophobie

Elle se manifeste principalement entre 14 et 17 ans et sa durée moyenne est d’un an et demi à 3 ans. Selon l’Inserm, après cinq ans d’évolution de la phase anorexique, deux tiers des patients sont guéris tandis que pour les autres, on parle d’anorexie mentale chronique.

Les personnes anorexiques se fixent des objectifs de contrôle rigide sur leur alimentation et leur poids, souvent à travers des jeûnes prolongés, des vomissements volontaires et une activité physique excessive. Cette obsession mène à un amaigrissement dangereux qui met leur santé en péril jusqu’au point de danger de mort. Les impacts sur leur vie quotidienne sont profonds, affectent leurs relations sociales, leur vie professionnelle et familiale, et entraînent souvent un isolement très important.

Les troubles alimentaires que sont l’anorexie mentale et la boulimie, qui seront abordés ci-dessous, sont intimement liés et peuvent être associés ou s’alterner : 20 % à 50 % des sujets souffrant d’anorexie mentale ont des crises de boulimie et 27 % des sujets souffrant de boulimie ont des antécédents d’anorexie mentale.

La boulimie

La boulimie se manifeste par des crises de consommation excessive de nourriture suivies de comportements compensatoires pour éviter de grossir. Il s’agit d’une véritable compulsion alimentaire qui pousse l’individu à manger presque malgré lui ; la perte de contrôle sur l’alimentation est totale. Le malade a d’ailleurs conscience que cette situation est anormale et dangereuse. Ces épisodes de gavage sont d’ailleurs souvent accompagnés d’un sentiment intense de dégoût, de culpabilité et de dévalorisation.

La peur maladive de prendre du poids pousse ensuite le patient à se provoquer des vomissements et/ou à utiliser des laxatifs pour éliminer les aliments pris en excès. Une activité physique excessive est également souvent notée chez ces personnes. Grâce à tous ces subterfuges, ils parviennent à ne pas grossir et leur Indice de Masse Corporelle (IMC) se situe souvent dans la normalité (entre 18,5 et 25).

Selon l’Inserm, le temps quotidien consacré à la prise alimentaire varie de une heure et demie à huit heures environ. La quantité de nourriture absorbée est parfois phénoménale, mais très variable suivant les individus. Il existe généralement une dizaine de crises de boulimie quotidiennes, cependant la fréquence peut aller jusqu’à 45.

Ce trouble peut sérieusement affecter la santé, notamment par des dommages gastro-intestinaux. Les relations sociales et professionnelles sont également impactées, et l’isolement social est fréquent. La souffrance psychique de ces malades est considérable.

L’hyperphagie boulimique

Selon l’Inserm, l’hyperphagie boulimique touche 3 % à 5 % de la population et concerne presque autant les hommes que les femmes. Elle est plus souvent diagnostiquée à l’âge adulte. Cependant, si ce trouble débute un peu plus tardivement, généralement « au-delà de 20 ans », des formes plus précoces existent mais elles sont d’autant plus sévères.

L’hyperphagie se caractérise par des épisodes de consommation excessive de nourriture sans comportements compensatoires (prise de laxatifs, vomissements, etc.). Par conséquent, elle se traduit fréquemment par un surpoids ou par une obésité, avec un IMC élevé. Les risques de maladies cardiovasculaires et de diabète sont d’ailleurs plus élevés. Apres les crises, les patients éprouvent de la culpabilité et de la honte, ce qui exacerbe leur souffrance psychique. Les impacts sur leur vie familiale et professionnelle sont significatifs, ce qui entraîne souvent un isolement social profond.

➡️ À lire : Guérir de l’hyperphagie : nos 6 astuces

Soigner les troubles du comportement alimentaire : conseils et stratégies

Le traitement des TCA nécessite une organisation multidisciplinaire. Il s’agit d’affectations à fort potentiel addictif, dont les mécanismes complexes mêlent les réactions d’un corps malade et des dysfonctionnements neuropsychiques et comportementaux.

Les approches thérapeutiques

À partir de la psychanalyse de Freud, de nombreuses méthodes et approches psychanalytiques ont été étudiées. Celles-ci restent basées sur la parole et le dialogue entre le psychologue et son patient en tête à tête. C’est l’exploration du passé et de ses traumatismes éventuels qui constitue la matière du travail thérapeutique pour comprendre ce que vit le patient au présent.

Les thérapies psychodynamiques s’adressent à toute personne en recherche de mieux-être par rapport à des étapes de vie. Elles sont également pratiquées dans des cas de troubles du comportement alimentaire car elles peuvent aider les patients à trouver d’autres moyens que l’alimentation pour lutter contre leurs angoisses. Toutefois, face à un patient souffrant de TCA, l’utilisation du cadre psychanalytique anglo-saxon, moins rigide que le modèle français, est recommandé. Il permet de rassurer le patient pour qu’il puisse tout exprimer et ait ainsi la force de plonger dans son inconscient. Un échange verbal plus actif permet aussi au thérapeute d’expliquer très concrètement au patient les mécanismes de sa maladie.

Les personnes atteintes de TCA souffrent de dissociation sensorielle et émotionnelle. Avec la thérapie d’intégration  neuro-émotionnelle (EMDR), elles peuvent intégrer sensations et cognitions par le biais des mouvements oculaires. En lien avec le cortex, ces gestes permettent de s’approprier les événements douloureux ou traumatisants de leur passé, de les retraiter et de désamorcer ainsi les pensées négatives et l’anxiété qui en découlent et qu’elles ne maîtrisent pas.

Les soins médicaux et les traitements nutritionnels

La rééducation nutritionnelle est une étape clé, souvent menée par des diététiciennes et des psychomotriciens pour rétablir une alimentation saine. Les hôpitaux de jour permettent de mettre en place des repas « thérapeutiques » qui jouent un rôle essentiel dans la guérison. Ces derniers sont organisés avec plusieurs patients et membres de l’équipe soignante. Ils servent à « dédramatiser » la prise alimentaire et offrent aux malades la possibilité de se nourrir en public sans éprouver de culpabilité. Une fois la confiance des patients rétablie, la réussite ultime serait de les voir manger « intuitivement » !

En cas de sous-nutrition sévère, une hospitalisation complète peut être envisagée, nécessitant parfois une sonde gastrique et des compléments alimentaires pour assurer un apport suffisant. Des contrats thérapeutiques sont signés pour définir les objectifs de poids du patient en accord avec l’équipe médicale.

Enfin, les visites de la famille et les sorties sont interdites en début de séjour hospitalier et n’interviennent ensuite qu’en contrepartie d’une reprise pondérale.

Les avancées récentes

Le soutien psychologique est primordial, avec des thérapies de groupe, des séances de méditation et divers ateliers pour renforcer l’estime de soi, réduire l’anxiété et lutter contre l’isolement.

Les avancées dans le choix des méthodes proposées aux patients sont très variées et susceptibles de correspondre à tous types de personnalités. Il peut s’agir de cohérence cardiaque, de photographie thérapeutique mais également d’hypnose etc…

L’accent est également mis sur la thérapie cognitive et comportementale spécifique (TCC). Elle est destinée à aider le patient à trouver le lien entre son comportement alimentaire et ses émotions ou leur gestion. Elle cible notamment des affirmations ou idées du patient telles que :   « manger fait grossir », « si je grossis, je me sens coupable », etc. L’approche psychocorporelle travaille sur la base des ressentis corporels des patients : il s’agit de psychomotricité associant étroitement les 3 niveaux d’organisation de l’être humain (biologique, émotionnel, mental).

La gestion des troubles associés, comme la dépression, l’anxiété et les TOC, est aussi cruciale pour une récupération complète.

➡️  À lire : la sophrologie caycédienne

Les TCA, et plus particulièrement l’anorexie, ont un lourd passif avec les magazines féminins. La maigreur des mannequins, considérés comme des modèles, a longtemps été montrée du doigt comme déclencheur de la maladie. Avec l’évolution du numérique, l’identification à un(e) autre est devenue encore plus perverse et biaisée. En effet, l’utilisation des filtres et la création d’avatars via l’IA rendent l’objectif de comparaison à atteindre d’autant plus difficile et improbable.

Seule consolation, la citation d’Oscar Wilde :

« La beauté est dans les yeux de celui qui regarde ».

 

Sylvie PAZZINI pour e-writers

Article rédigé lors du cursus de formation en rédaction web chez FRW

Article relu par Charlotte, tutrice de formation chez FRW

Sources :

Site de l’INSERM

Site de l’HAS (Haute autorité de santé)