La construction en terre crue est une technique utilisée depuis la Préhistoire. Ce matériau naturel se compose de terre argileuse, d’eau, de sable ou gravier, et parfois de fibres végétales. La terre est une matière saine et écoresponsable : elle constitue une ressource locale présente en abondance à travers le monde. Construire en terre crue est une formidable solution face aux enjeux environnementaux d’aujourd’hui. Traversant les âges, cette méthode durable dispose de tous les atouts pour bâtir de manière plus respectueuse de la nature. Quatre des douze modes de construction en terre crue se trouvent en France. Pisé, adobe, bauge ou torchis : tour d’horizon de ces techniques, leurs avantages et leurs inconvénients.
L’histoire millénaire de la terre crue
Depuis des millénaires, l’humanité crée des habitats en terre. C’est l’un des premiers matériaux de construction employés dans le monde. Petites habitations, villes ou palais, quelques édifices façonnés avec cette matière peuvent vous sembler familiers : les maisons à colombages en France ou les kasbahs et médinas du Maroc par exemple. Et saviez-vous qu’une grande partie de la muraille de Chine est bâtie en terre crue ?
D’après l’UNESCO, 17 % des « sites du patrimoine culturel mondial » sont bâtis en terre. La plus ancienne construction encore debout a environ 3 300 ans : le Ramasseum, qui se trouve dans la vieille ville de Thèbes (Égypte).
Pourtant, au début du 20e siècle, cette tradition ancestrale se perd en Europe et aux États-Unis. Deux raisons principales :
- la guerre de 1914-1918, dont les pertes humaines ont engendré la disparition des savoir-faire ;
- la révolution industrielle, avec le développement des transports et l’arrivée du ciment.
Reléguée au rang de matériau désuet et fragile, la terre crue devient une méthode rustique du passé. L’architecture moderne privilégie le ciment, l’acier et les briques, plus rapides à mettre en œuvre, mais avec un impact environnemental élevé. Néanmoins, depuis que l’humanité a pris conscience de la crise énergétique, la terre crue connaît une renaissance.
Bien que la France ne dispose d’aucune réglementation sur le sujet, cette technique revient depuis quelques décennies. Des initiatives sont engagées pour établir des études et les diffuser. La terre sera peut-être la matière écologique phare de l’architecture de demain.
🔎 Le saviez-vous ? 40 % de la population mondiale vit dans des habitations en terre. En France, 15 % de l’ensemble du patrimoine architectural est en terre crue.
Les différents types de construction en terre crue
Divers procédés se sont développés en fonction de la composition du sol, des ressources présentes et de la situation climatique. Parmi les douze méthodes de construction en terre, voici les quatre principales :
L’adobe
L’adobe est une brique de terre crue. La terre humide est façonnée à la main ou moulée mécaniquement, puis séchée à l’air. Le montage du mur s’effectue avec les briques et un mortier de terre. C’est une méthode ancestrale répandue dans le monde entier, qui permet de monter des murs porteurs.
La bauge
La bauge, ou cob en anglais, est une matière malaxable issue d’un mélange de terre argileuse, de fibres végétales (paille, chanvre, lin, etc.), et parfois de sable. La technique consiste à empiler des mottes de terre et les tasser, afin de façonner un mur épais, bâti par couches successives.
Cette méthode se réalise sans coffrage ni outils spécifiques. Ce procédé traditionnel apparaît surtout en Bretagne, et s’est étendu sur tout le territoire, dans les régions peu boisées contenant de la pierre pour créer un soubassement. Elle permet de réaliser des murs porteurs.
Le pisé
Plus connu, le pisé est une technique antique. Cela consiste à comprimer un mélange de terre argileuse humide et de sable ou graviers dans un coffrage par couches successives, en vue de la rendre très dense. Aussi nommé « terre banchée » en référence aux « banches » (les coffrages de bois), le pisé est une pratique courante dans les régions boisées. Il est répandu en Isère, où 75 % des habitations rurales sont bâties avec cette technique.
Le torchis
Le torchis ressemble à une pâte issue d’un mélange d’argile humide et de paille ou fibres végétales. La méthode consiste à garnir une armature : une trame de bois, des panneaux ou un treillis. Cette technique est employée dans les régions boisées, permettant une ossature bois porteuse. Le torchis est populaire dans le nord et l’est de la France, en particulier sur les maisons à colombages.
La terre crue pour un habitat écoresponsable
« Construisez votre architecture à partir de ce qui se trouve sous vos pieds. » Hassan Fathy
Les avantages écologiques
Construire en terre crue a un impact environnemental faible car elle est :
- locale ;
- abondante ;
- recyclable ;
- non polluante.
La terre est une ressource présente en abondance partout dans le monde. C’est une matière première naturelle de choix. Sa composition d’origine végétale et minérale ne génère aucun déchet. En effet, sans être mélangés à du ciment ou toute autre substance toxique, les murs peuvent être dissous et recyclés, ou revenir à la Terre sans nuire à l’environnement.
De plus, la terre crue a un excellent bilan carbone : ce matériau brut ne nécessite aucune fabrication. D’autre part, elle sollicite peu d’énergie pour sa transformation et son transport lorsqu’elle est extraite sur place. Une construction en terre crue n’utilise que 3 % de l’énergie consommée dans une structure en béton.
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Les avantages techniques de l’habitat en terre
La construction en terre crue présente des propriétés intéressantes :
- une hygrométrie régulée ;
- une excellente inertie ;
- une très bonne conductivité thermique ;
- un confort considérable ;
- une protection contre le feu ;
- une résilience remarquable ;
- une protection contre les ondes.
Le mur en terre absorbe et restitue l’humidité ambiante. Les murs sont « perspirants », ils régulent l’hygrométrie et évitent ainsi la condensation et les moisissures. Une ventilation mécanique est inutile, car le foyer est sain et imputrescible.
En hiver, les murs en terre stockent la chaleur du soleil la journée pour la rendre la nuit. C’est le contraire en été, l’habitat conserve la fraîcheur. Cela contribue à rendre son habitat plus écologique en réduisant la consommation énergétique pour le chauffage ou la climatisation de la maison.
De plus, à l’inverse du ciment et de la chaux, la mise en œuvre est plus agréable : la terre est un matériau non toxique ni irritant, sans substance volatile.
Les murs de terre crue sont résistants aux chocs et à la compression. Par ailleurs, l’argile est ignifuge : après un incendie, les murs restent intacts.
Parce qu’ils sont denses, les murs en terre réduisent le passage des ondes électromagnétiques : le réseau a du mal à les traverser. Pour avoir une connexion, placez un dispositif par les ouvertures telles que les fenêtres et le plafond, tout simplement.
Les inconvénients de la construction en terre
Les constructions en terre disposent de points de vulnérabilité à prendre en compte :
- Les murs sont perméables.
- Ils ont une faible capacité d’isolation.
- Ils sont plus lents à sécher.
- La mise en œuvre est physique.
- Le savoir-faire se fait rare.
Un abri contre la pluie et le ruissellement est essentiel afin d’éviter l’érosion des murs. Avec un débord de toit suffisant, des fondations et un soubassement (en pierre ou en brique), la terre est protégée des infiltrations et des remontées d’eau par capillarité.
De plus, les murs en terre ont un faible pouvoir isolant. Il convient d’ajouter de l’isolation par l’extérieur ou par apport de fibres végétales (chanvre, paille) dans le mélange, tel que le font la bauge ou le torchis.
Par ailleurs, la réalisation d’un projet en terre crue est soumise aux intempéries et prend plus de temps qu’avec d’autres matériaux : la durée de séchage est variable selon les saisons. Monter les murs par temps sec, en printemps et en été, reste l’idéal.
Construire avec la terre est contraignant, car sa densité rend le matériau lourd. Lever les briques d’adobe ou les mottes de bauge de manière répétée, remplir les coffrages du pisé et les damer, cela impose une certaine capacité physique.
Les artisans qui maîtrisent l’art de la construction en terre sont recherchés et peu communs. On trouve peu de formations professionnelles dans ces domaines. Le meilleur moyen de s’y former est de participer à des chantiers participatifs ou de se lancer dans le wwoofing.
Malgré quelques inconvénients, la construction en terre crue est un excellent choix pour qui souhaite bâtir des maisons robustes de façon plus respectueuse de l’environnement, avec des matériaux naturels et intemporels. L’architecture de terre apporte un confort notable et apparaît comme une solution durable face aux enjeux écologiques actuels.
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Elora Scalzotto, pour e-Writers
Article rédigé lors du cursus de formation en rédaction web chez FRW.
Article relu par Charlotte BEYDON, tutrice de formation chez FRW.
Crédit photo : Elora Scalzotto
Sources :