« S’il vous plaît… dessine-moi la ville du futur. Je veux qu’elle vive longtemps. » Avez-vous une autre idée pour les jeunes générations qu’une ville écologique ? Une cité verte où chacun s’implique dans un projet utile à la transition écologique. On y plante forcément des arbres. S’impose alors la méthode Miyawaki avec la création de forêts urbaines. Elles sont parfois contestées au sein même des milieux écologistes, car il s’agit d’une pratique pionnière, encore récente. L’impact environnemental des micro-forêts est en cours d’étude. Pour quelles raisons avons-nous tout à gagner de les encourager ? La réponse se situe du côté de l’écoresponsabilité.

1. Imaginer la ville de demain en différenciant bien forêt urbaine et écosystème forestier en milieu naturel

D’emblée, levons un doute posé par un quiproquo sémantique. Ces forêts ne sont pas les forêts à caractère naturel que nous voyons en milieu rural. Elles regroupent divers types de boisement. Les micro-forêts Miyawaki en font partie : ce sont des groupes d’arbres plantés en densité pour restaurer une petite surface de sol artificialisé. Elles s’intègrent à un projet de ville végétalisée. Le botaniste Akira Miyawaki a développé cette méthode dès les années 1970 au Japon afin de renaturaliser des milieux endommagés. On distingue trois étapes :

  • préparer et amender le sol ;
  • choisir des espèces végétales indigènes et variées ;
  • les enraciner et les semer en maillage serré (3 arbres par mètre carré), à la bonne saison.

Résultat ? En concurrence pour capter la lumière solaire, les arbres accélèrent leur croissance. Ils atteignent leur maturité en trente ans, contre cent années lorsqu’ils poussent spontanément en milieu naturel.

Ce modèle est importé en Europe depuis une dizaine d’années. Quelques scientifiques ont commencé par le rejeter à cause du manque de recul sur les premiers constats. Tentation de greenwashing pour certaines entreprises ? Ils le jugeaient plus communicationnel que scientifique.

2. Agir sur son territoire dans une démarche participative

C’était sous-estimer la nécessité d’agir pour se réapproprier la ville de demain et s’engager dans une démarche écoresponsable. Akira Miyawaki préconisait d’ailleurs en partie cette technique pour sensibiliser la population aux enjeux environnementaux en l’impliquant à l’échelle locale. Quoi de plus motivant que de chercher à améliorer son habitat en se rassemblant autour d’un projet commun ? Se sentir utile, trouver l’occasion de se sociabiliser, mais aussi lutter ensemble contre l’éco-anxiété : les raisons sont diverses de participer à une création de micro-forêt. Ensuite, le paysage d’une ville évolue vite et les habitants d’un écoquartier ont besoin de constater des résultats rapides. Trente ans pour arriver à un stade de maturité et d’équilibre… C’est une durée raisonnable et déjà conséquente à l’échelle d’un projet urbain et d’une vie humaine.

« Ce sont les petites choses que font les citoyens. C’est ça qui fera la différence. Ma petite chose à moi, c’est de planter des arbres. »
Wangari Maathai

Forêt urbaine plantée sur un talus du boulevard périphérique parisien, au niveau de la porte de Montreuil.

40 volontaires ont participé à cette première plantation de Boomforest en 2018, porte de Montreuil à Paris. Photo © Peter Yeung pour l’Association Boomforest

3. S’engager dans un mouvement global de reforestation

Bien sûr, la priorité est de limiter la trop grande émission de carbone et d’empêcher la déforestation. Vous pouvez suivre d’ailleurs l’actualité du couvert forestier mondial en vous rendant sur le site de Global Forest Watch. En tout cas, depuis 2020, tout le monde est d’accord pour faire pousser des arbres. Le Forum économique mondial a projeté de mettre en terre mille milliards d’arbres. La Commission européenne table quant à elle sur 3 milliards en Europe d’ici à 2030. Belles promesses ou non, tous les feux sont au vert !

Cependant, savez-vous planter des arbres ? Cela ne s’improvise pas et il vaut mieux être accompagné. Que vous soyez acteur public ou particulier, contactez par exemple l’un des organismes suivants : Urban Forests, MiniBigForest, Boomforest, Reforest’Action, BeeForest ou SUGi. Vous pourrez proposer un nouveau projet, chercher à en subventionner un, participer à une plantation à proximité de chez vous ou l’entretenir. Le panel d’actions volontaires d’afforestation est varié.

Des adolescents plantent des arbres pour créer une micro-forêt à Gilly, en Belgique.

Dans cette micro-forêt, les élèves d’un établissement secondaire belge ont planté un vingtième d’espèces d’arbres indigènes. Photo © Urban Forests www.urban-forests.com

4. Lutter contre le phénomène d’îlot de chaleur

Mais qu’y gagnent les villes ? Elles bénéficient des divers services écosystémiques offerts par ces mini-forêts. Le premier est la limitation du réchauffement. Les infrastructures citadines captent et accumulent la chaleur solaire pendant la journée, pour la restituer pendant la nuit. La ville devient alors un îlot de chaleur. Or, le couvert des arbres réduit les temps d’insolation des mobiliers (et des promeneurs) par leur ombrage. Et l’évapotranspiration des feuillages abaisse la température de l’air.

5. Développer la biodiversité en ville

Suffit-il d’enraciner des arbres ? Planter une forêt urbaine c’est respecter chaque strate végétale d’une forêt. Il faut aussi semer les graines d’espèces végétales indigènes de mousses et champignons, d’herbacées et d’arbustes. Les symbioses mycorhiziennes favorables à la croissance des arbres vont pouvoir se mettre en place. Et l’écosystème constitué accueillera la faune qui pourra s’y plaire. Chaînes de prédation, pollinisation, fertilisation des sols, corridors écologiques : autant de services qui sont créés.

Est-ce un moyen d’enrayer l’érosion de la biodiversité ? Ce qui est sûr c’est qu’une jeune micro-forêt accueille davantage d’espèces végétales et animales qu’un bosquet urbain local traditionnel. Mais l’écosystème constitué est-il pérenne ? Les arbres ont une morphologie différente, car ils poussent plus haut et ont un tronc plus fin. Néanmoins, le dernier rapport de l’organisation SUGi, en 2023, parle d’un taux de survie prometteur de 87,1 %. Reste à continuer d’observer le développement de ces écosystèmes pour voir comment ils réagiront dans plus de trente ans. Chaque projet sert à ajuster et à améliorer la méthode Miyawaki. Par exemple, commencer à prévoir des espèces résilientes qui s’adapteront aux effets du réchauffement climatique.

🌱 Envie de donner un coup de pouce à la nature dans votre quartier : lisez ces 5 bonnes idées pour préserver les espèces autour de chez soi.

6. Aider les sols à regagner en perméabilité

Les revêtements de sol urbain sont imperméables et accroissent le ruissellement. Le problème est sans conteste d’actualité ! Saturation des réseaux d’évacuation, inondations : les collectivités réfléchissent aux moyens de faciliter la bonne infiltration des eaux pluviales. Les espaces végétalisés en pleine terre en font partie. D’une part les arbres et autres plantes absorbent l’eau et les sels minéraux par leurs racines, drainant ainsi le sous-sol. Ce système racinaire assure une bonne structure au sol afin que la pluie s’évacue plus rapidement en profondeur.  D’autre part, ils constituent par leurs tiges et feuillages une barrière physique à l’écoulement des eaux en surface.

7. Contribuer à la dépollution

Au cours de la photosynthèse, les plantes utilisent du dioxyde de carbone pour synthétiser leur matière organique et rejeter de l’oxygène. Le service qu’elles rendent est vital. Les arbres contribuent également à fixer certaines particules polluantes dans leur feuillage ou dans le sol, et donc à épurer l’air. Peut-on parler de puits de carbone ? Les mini-forêts ne rivaliseront pas avec les poumons verts de nos planètes, comme l’Amazonie ou l’océan : leur pouvoir est limité. Elles ne compenseront pas non plus l’émission croissante de molécules polluantes.

L’effet bénéfique des plantations d’arbres en ville doit nécessairement s’accompagner d’une réduction de la circulation automobile ! D’autant plus que, lorsque certains composés organiques volatils émis par les plantes s’associent avec des oxydes d’azote, cela peut renforcer la pollution à l’ozone. C’est ce qui a été observé à Berlin, en période de fortes chaleurs.

8. Se connecter à la nature

On le dit moins, mais côtoyer des espaces végétalisés en ville fait du bien, diminue le stress et améliore la santé. Les adeptes de l’arbologie le savent. Se connecter à la nature c’est se relier au cycle de la vie, à notre cerveau reptilien, à nos besoins fondamentaux. C’est aussi comprendre comment fonctionne notre environnement naturel. Les enfants, comme les adultes, ont besoin de connaître les mécanismes biologiques, d’être sensibilisés au vivant.

Un adulte apprend à un enfant comment planter un jeune arbre.

Créer une forêt urbaine est aussi un acte de pédagogie et de solidarité. Ici dans la Maison d’accueil spécialisée Fraîche Pasquier à Couëron (44). Photo @MiniBigForest

C’est enfin profiter des bénéfices thérapeutiques apportés par certaines molécules présentes en forêt. Les sylvothérapeutes vantent les effets des phytoncides émis par les arbres pour se défendre des prédateurs et qui aident l’être humain à se détendre. De même une bactérie présente dans la terre, Mycobacterium vaccae NCTC 11659, aurait des vertus anti-inflammatoires, immuno-régulatrices et anti-stress.

9. Améliorer son bien-être dans un cadre de vie de qualité

Bienfaits sanitaires seulement ? Les citadins, toujours plus nombreux, affectionnent les quartiers végétalisés qui stimulent la sensibilité et le sens esthétique. Ils apprécient une architecture urbaine remodelée par la nature, mais aussi son paysage sonore. Car les micro-forêts offrent la musicalité des oiseaux et des insectes, et atténuent le bruit de la circulation automobile.

Reste à célébrer ces villes qui redonnent de la place aux forêts urbaines et donnent l’exemple. Tree Cities of the World s’en occupe. Vérifiez donc si votre ville peut être reconnue comme « ville du monde amie des arbres ».

Favoriser la création de micro-forêts dans sa commune, c’est la garantie de s’engager dans une démarche active écoresponsable gagnante pour sa planète et pour soi. Mais ce n’est pas la seule initiative de végétalisation urbaine à laquelle vous pouvez participer. Pensez aussi aux « cours oasis », aux toits végétalisés et au jardin partagé !

🌱 Déjà prêts à retrousser vos manches ? Alors partagez cet article pour convaincre votre entourage de se lancer dans l’aventure !

 

Sources :

Brabandère (de) N. et Malengreau D., 2023. Étude de forêts Miyawaki en Belgique. In: www.urbanforest.be.

Coupland G., 2022. SUGi Impact Report. In: www.sugiproject.com

Miyawaki A., 1999. Creative Ecology : Restoration of Native Forests by Native Trees. In: Plant Biotechnology, 16(1), 15-25.

 

Stéphanie Hémery, pour e-Writers

Article rédigé lors du cursus de formation en rédaction web chez FRW.

Article relu par Anne, tutrice de formation chez FRW.

 

Crédit de la photo de couverture : image de freepik.