Vous êtes parent et vous envisagez d’initier vos enfants aux échecs ? Sachez que le roi des jeux, auparavant réservé à une partie marginale et privilégiée de la population, tend à se démocratiser. En France, on évalue à 5 millions le nombre de joueurs, dont 55 000 licenciés en club. Alors, pourquoi mettre son fils ou sa fille aux échecs ? Ce sport cérébral permet-il vraiment, grâce à sa réflexion analytique, d’améliorer les performances scolaires d’un élève ? Quels sont les bienfaits de cette pratique sur le développement des jeunes ? Voici les principaux avantages de cet apprentissage.

Miser sur les échecs pour s’améliorer à l’école : un mythe persistant

Débarrassons-nous d’abord d’un préjugé durable. Non ! La pratique des échecs n’implique pas nécessairement de progrès scolaires significatifs.

Les échecs ne font pas progresser les élèves

En effet, plusieurs études récentes (menées par l’University College London en 2017) ont invalidé l’idée selon laquelle jouer aux échecs rendrait les enfants plus performants en calcul et en lecture. Non, il n’y a pas de transfert de compétences vers les apprentissages scolaires. Ce jeu, aussi cognitif soit-il, n’augmente pas non plus les scores de QI. La pratique ne fabrique pas des premiers de classe et n’est pas réservée aux petits précoces ! Mais il y a d’autres très bonnes raisons de choisir cette activité.

De plus en plus d’écoles proposent des cours d’échecs à leurs élèves

Pour preuve, un peu partout en France, les établissements scolaires (corses ou cannois par exemple) ont introduit l’apprentissage systématique des règles dans leurs classes. Certaines écoles Montessori (ou autres établissements de pédagogie alternative) recourent également à un professeur certifié. Plus largement, avec le dispositif Class’Échecs, mis en place en mars 2022, ce sont 250 000 élèves du premier degré, de la maternelle jusqu’au CM2, qui découvrent le jeu au sein de l’école. Toutes ces initiatives attestent que les échecs sont considérés comme un très bon support pour appréhender la citoyenneté et le respect des règles collectives. Sa pratique apporte une fonction éducative, sociale et sanitaire, et s’appuie sur le principe de l’égalité des chances. En effet, ce sport fait fi des différences d’âge, d’aptitudes physiques ou mentales. Il redonnera parfois confiance au petit garçon timide qui ne lit pas aussi vite que les autres ou à la fillette dysphasique qui souffre d’un retard de langage.

⇒ Pour en savoir plus sur le dispositif Class’Echecs

Apprendre les règles d’un jeu complexe : une vraie bonne idée quel que soit l’âge

Les échecs, comme tous les jeux, ont des vertus ludiques et pédagogiques sur l’enfant (comme sur l’adulte).

La beauté des règles du jeu des rois

Rien que la découverte des déplacements des pièces est en soi un apprentissage complexe. De l’avancement très simple du pion, à celui moins intuitif du cavalier, ce sont 6 trajectoires distinctes qu’il faut assimiler pour pouvoir attaquer le roi adverse. Par ailleurs, il y a l’ensemble des règles connexes à maîtriser : coups illégaux, différentes sortes de mat ou possibilités de roque (quand la tour et le roi échangent leur place pour mettre ce dernier à l’abri). C’est finalement l’appréhension d’un monde fini, complexe et régi par ses propres lois que découvre le jeune apprenant (ou l’adulte débutant).

Les multiples qualités développées chez le joueur d’échecs

Ainsi, la maitrise des règles stimule de nombreuses aptitudes chez le petit pousseur de bois qui va :

  • s’entraîner à passer d’une mémoire à l’autre ;
  • tester sa persévérance et sa patience ;
  • engranger et sélectionner différentes connaissances ;
  • faire appel à plusieurs formes de concentration ;
  • élaborer des stratégies ;
  • s’exercer au calcul ;
  • consolider son rapport au temps (grâce à la pendule) et à l’espace (visualisation des déplacements) ;
  • devenir créatif.

Licencier un jeune dans un club : la promesse d’une sociabilité intergénérationnelle et stimulante

Si l’enfant témoigne d’une vraie passion pour les 64 cases, ses parents penseront peut-être à le licencier dans un club et lui offrir ainsi l’accès à une communauté tout à fait particulière.

Apprendre à travailler ses ouvertures, son milieu de jeu et ses finales

Intégrer un club, c’est se confronter au socle théorique des échecs et progresser par paliers répartis sur une année scolaire. L’élève apprend « les ouvertures », ces enchainements de coups de début de partie qui déterminent la couleur du match à venir. Très codifiées, les ouvertures sont un moyen de se familiariser avec l’esprit du jeu. Peu à peu, l’enfant découvre quel joueur sommeille en lui. Il n’est pas rare qu’un élève timide se révèle agressif ou qu’un exubérant joue la prudence avec ses pièces. Quand il s’agit de tactique ou de stratégie, l’élève parcourt les différentes manières d’attaquer ou de défendre. Il s’essaie aux configurations dans lesquelles il est le plus à l’aise. L’échiquier amène une meilleure connaissance de soi.

Investir l’esprit d’équipe

Intégrer un club, c’est également prendre sa place dans une équipe, avec un objectif commun. Lors des rencontres interclubs, les licenciés apprennent à s’encourager les uns les autres. L’adversaire de la veille devient le partenaire du jour. Les clubs, ces dernières années, misent particulièrement sur l’esprit d’équipe (avec des maillots siglés et des déplacements en groupe dans d’autres villes). Aux échecs, les équipes jeunes sont toujours constituées de 8 membres de 10 à 16 ans, ce qui permet une sociabilité riche et diverse où se côtoient lycéens et élèves du primaire.

Initier les enfants aux échecs : les bienfaits de la compétition

Aux échecs, les joueurs sont soumis au classement ELO. Les points ELO sont ceux qu’on perd ou qu’on gagne à chaque partie homologuée ; ils sont mis à jour chaque mois sur le site fédéral. Pour donner un ordre de grandeur, les débutants démarrent autour de 1 000 quand le champion du monde tourne autour des 2 800 points.

Le jeune va donc participer à des tournois, opens et championnats, en partie lente ou rapide. C’est tout un éventail de compétitions qui existe pour jouer de manière officielle et tenter de conquérir (ou de perdre) les précieux points ELO. Des « opens » durant huit jours aux tournois de blitz du dimanche après-midi, c’est à chaque fois à la même exigence du jeu que l’enfant sera confronté. C’est le moment d’apprendre la défaite, l’humilité et de savourer les victoires. Initier son petit aux échecs lui permet d’exercer son mental, de mobiliser ses ressources, de rebondir après une déception.

Amener les petites filles vers les échecs : la féminisation d’un sport encore très masculin

Force est de constater que ce sont essentiellement aux petits garçons que les parents proposent les échecs.

Des licenciés essentiellement masculins : les filles en retrait dans les clubs et dans les classements

Dans l’opinion publique, les échecs ont longtemps été un loisir d’hommes. Par conséquent, les petites filles se tournent moins naturellement vers les échecs que leurs camarades masculins. Les chiffres sont sans appel : les femmes sont minoritaires et leur niveau général beaucoup plus faible que celui des hommes. Dans ce milieu qui a longtemps été sexiste, les féminines sont encore très peu nombreuses dans les clubs et dans les palmarès mixtes. D’ailleurs, les joueuses ont leur propre championnat de France et certaines compétitions leur sont dédiées tout au long de l’année. Les sœurs Polgár qui, dans les années 90, concurrençaient les joueurs masculins en obtenant le grade de Grand Maître International, restent une exception.

L’amorce d’un changement

Cela dit, on observe ces dernières années, une volonté de féminiser le sport. Dans la lignée de la série Netflix Le jeu de la Dame, certaines jeunes filles ont envisagé de se licencier. Et lors des championnats jeunes, quelques-unes n’hésitent plus à jouer contre les garçons plutôt qu’en catégorie féminine.

Récemment, les mathématiques ont permis aux femmes de se distinguer parmi l’élite. Dans ce même esprit, les parents qui offrent l’opportunité aux fillettes de pratiquer dégagent la barrière mentale qui en fait un sport masculin. Ils ouvrent la possibilité aux échecs féminins de prendre une vraie place. Ils participent à donner aux joueuses leurs lettres de noblesse échiquéenne.

⇒ Pour en savoir plus sur la féminisation du milieu des échecs

La pratique des échecs chez un individu en construction permet d’appréhender une certaine complexité. L’entrainement régulier maximise les capacités d’attention et la réflexion analytique. Attention néanmoins ! Si vous initiez votre enfant à ce jeu, il faudra être vigilant à ne pas tomber dans le culte du champion, à résister au vertige parental de la victoire. Laissons les échecs pour ce qu’ils sont : un passionnant sport cérébral.

Marie Jacob pour e-Writers
Article rédigé lors du cursus de formation en rédaction web chez FRW. Article relu par Agathe, tutrice de formation chez FRW.

Sources: