Souffler le verre, quelle drôle d’idée ! Elle parait encore plus folle quand on entre dans l’atelier offrant le spectacle des matériaux en fusion. L’artisan verrier capture la pâte rougeoyante, dans l’intention de lui faire subir des transformations. Pour lui donner forme, il va la gonfler, la rouler, la tordre, l’étirer avec précision et dextérité. C’est ainsi qu’il parvient à la création de vases et autres objets jouant de transparence et de couleurs. Le souffleur de verre déploie de nombreuses capacités, tout en bravant la chaleur. Qu’il pratique son art sur des sites réputés, comme à Murano, en Italie ou dans un petit coin reculé de France, il reste l’héritier et le passeur d’un savoir-faire ancestral. Voyons son histoire.
L’art verrier : de quoi s’agit-il ?
L’artisan verrier met en forme, fabrique et décore des objets en verre ou en cristal pour différents secteurs : arts de la table, luminaire, arts décoratifs, bijouterie, chimie. Ainsi, les pièces réalisées sont appréciées pour leur usage et leur valeur esthétique. Les conditions d’exercices, outils et productions ont évolué avec le temps. Mais les gestes et techniques de base restent inchangés depuis des siècles.
L’art verrier appartient à la catégorie des arts du feu. On le constate en découvrant l’ambiance ardente d’un atelier. Car c’est à une température de 1 300 °C que la silice (sable avec du quartz) arrive à son point de fusion et se transforme en pâte de verre. Le façonnage peut alors se réaliser de deux manières : à la canne ou au chalumeau. Quelle que soit sa spécialité, le verrier à l’art et la manière d’apprivoiser ce matériau noble. C’est un métier de passion.
« Du jour où il a rencontré le verre, la matière en fusion lui a permis de trouver comment exprimer sa colère, transcender sa tristesse en beauté, canaliser sa rage pour la transformer en objets qui tentent d’apporter un peu de beauté à ce monde. Il a brûlé ses démons dans le four de cette passion ». Extrait du synopsis du documentaire de Jérôme de Gerlache Heart of Glass, la vie passionnée d’un maître verrier.
Le métier de souffleur de verre
Les techniques et outils de l’artisan du verre
Outre une bonne résistance physique et un savoir-faire spécifique, le souffleur de verre doit être créatif. Son réel sens artistique lui permet de travailler les formes, les couleurs et les volumes. Les termes de souffleur de verre et de verrier sont parfois employés indifféremment. Or, cette technique, qui consiste à donner du volume aux objets, est une composante du métier de verrier.
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Le travail à la canne
- Le « souffleur à la canne » recueille la pâte de verre en fusion (cueillage) à l’extrémité d’un long tube d’acier creux.
- Il y insuffle de l’air qui va se dilater sous l’effet de la chaleur et créer une bulle dans le verre. Cette boule vide est la première étape. Le professionnel doit savoir saisir le « palier ». C’est ce court instant propice où la pâte à l’état liquide devient visqueuse et malléable, grâce à la baisse de température. En deux minutes, la matière refroidit et durcit. Donc, il faut agir vite.
- Il la fait rouler pour répartir son épaisseur. Parfois, le verrier fait tourner la masse chaude sur une table en acier (le marbre), pendant qu’un assistant souffle dans la canne.
- Il prélève de la matière, souffle et tourne l’ébauche après des réchauffages successifs, jusqu’à aboutir à la forme et au volume définitifs souhaités. Ce geste sûr et rapide est exécuté librement à main levée ou guidé dans un moule en bois (mailloche).
L’artisan utilise cette technique pour réaliser des carafes, vases, bijoux, éléments de décoration ou flacons de parfum.
Le travail au chalumeau
Le chalumeau est utilisé pour réaliser des pièces destinées à des scientifiques ou à l’industrie électronique, par exemple. L’usage de cet outil et de l’air comprimé permettent aujourd’hui de réduire les opérations manuelles. Cependant, des artisans utilisent également cette technique pour des pièces de petite taille comme des perles ou sculptures. Ils modèlent des tubes et des baguettes de verre de différentes couleurs sous la flamme du chalumeau. Mais, l’art du soufflage reste indispensable pour assurer la qualité du produit fini. En soufflant dans des tubes en verre creux chauffés avec cet outil, l’expert reprend des gestes similaires à celui qui travaille à la canne.
👉D’autres professionnels, s’il est en équipe, peuvent prendre le relais pour façonner, à l’aide de pinces, d’autres éléments (anses du vase, pied du verre, etc.).
Dans ces métiers, la lenteur et la maladresse ne pardonnent pas. C’est pourquoi la parfaite maîtrise de ces tâches s’acquiert sur un temps long, principalement par la pratique et la répétition.
Souffleur de verre en atelier. Source Istockphoto.
Les parcours de formation pour devenir souffleur de verre
Intéressé par cette profession ? Sachez que le CAP arts du verre et du cristal ou le CAP souffleur de verre, deux diplômes de niveau 3, permettent d’accéder au métier de souffleur. Accessible pour les jeunes en formation initiale ainsi que pour les adultes, il peut donc être envisagé dans le cadre d’une reconversion.
D’autres cursus offrent la possibilité d’aller plus loin :
- Le Brevet des Métiers d’Art (BMA) souffleur de verre en 2 ans et le Brevet de Technicien (BT) dessinateur en arts appliqués option verrerie cristallerie en 3 ans. Ils valident un niveau 4.
- Le Diplôme des Métiers d’Art (DMA) décor architectural, option arts du verre et du cristal, de niveau 5.
- Le Diplôme National des Métiers d’Arts et du Design (DN MADE), Matériaux, de niveau 6.
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Les entreprises et ateliers du travail du verre
Le verre de Murano est réputé et utilisé dans le monde entier pour sa coloration et son élaboration particulière. Héritiers de ce savoir-faire antique, les maîtres verriers vénitiens ont porté cet art à des sommets. Ils sont à l’origine de son développement dans toute l’Europe. Certes, les premières grandes verreries ont vu le jour sur cette petite île du nord de Venise. Cependant, les gestes traditionnels des métiers d’art verrier, se sont perpétués également en France, grâce à une main-d’œuvre d’artisans qualifiés.
Les spécificités de la verrerie en France
En tant qu’ouvrier spécialisé, le verrier à la main peut être un artiste, un artisan à son compte ou salarié de petites, moyennes ou grandes entreprises.
La cristallerie à la main représente moins de 0,05 % de la production française en verre creux (Source : Fédération des cristalleries et verreries à la main et mixtes, FCVMM). Les grandes maisons réputées de l’est de la France n’offrent pas plus d’une dizaine d’emplois par an. Cependant, elles se partagent le marché et possèdent un réseau de distribution international. 80 % du chiffre d’affaires des cristalleries est réalisé directement ou indirectement à l’export. Ainsi, Lalique (Alsace), Saint-Louis (Vosges) Daum ou Baccarat (Lorraine), disposent d’une très forte notoriété.
La majeure partie de la production d’objets en verre est industrialisée. Elle est géographiquement concentrée sur certaines régions (PME et ETI en Nord-Picardie, Normandie, et Rhône-Alpes). Les verreries de Normandie produisent 85 % des flacons de parfum.
La part la plus importante de la production artisanale d’objets en verre est assurée par quelques entreprises de taille moyenne (entre 50 et 500 salariés).
Les ateliers de verrerie de taille plus modeste, répartis sur le territoire, sont davantage tournés vers une activité à caractère pédagogique : accueil du public, sensibilisation aux métiers du verre, démonstration et réalisation de pièces proposées directement à la vente. Cela peut être une bonne idée de sortie en famille. Ce sont souvent des ateliers de type familial ou d’artistes verriers indépendants. Ils peuvent se consacrer à la recherche technique et esthétique, voire collaborer avec d’autres professionnels : designers, plasticiens.
Rencontres avec les artisans d’art
Les métiers de la verrerie ne sont pas réservés aux hommes. Les femmes ont été au cœur d’un colloque international en mars 2020, co-organisé par le Musée du verre de Charleroi (Belgique) et l’AMAVERRE (association de médiatisation des arts du verre, France). Son intitulé : Femmes de verre, femmes de verrerie. Cette rencontre visait entre autres à mettre en avant la femme, « pour que celle-ci ne reste pas aussi transparente que du verre ». En effet, elle participe à la vie de ce matériau depuis deux mille ans, mais sa place n’avait jamais été réellement étudiée jusqu’alors. Ce secteur d’activité fait régulièrement l’objet de manifestations. Le syndicat professionnel Ateliers d’Art de France, par exemple, fédère plus de 6 000 artisans artistes et manufactures d’art à travers l’Hexagone. Il incite, par ses publications, à découvrir ces activités.
Profitez du spectacle offert par ces passionnés : gestes synchronisés, travail sur l’harmonie des couleurs. Qui sait, le souffleur de verre se transformera peut-être, pour vous, en souffleur de rêves.
Sylvie Ingremeau pour e-Writers
Article rédigé lors du cursus de formation en rédaction web chez FRW
Article relu par Agathe, tutrice de formation chez FRW
Sources :
https://www.institut-metiersdart.org/metiers-art/fiches-metiers/verre-et-cristal
https://www.lemondedesartisans.fr/actualites/verrerie-cristallerie-lartisanat-au-coeur
https://www.onisep.fr/Ressources/Univers-Metier/Metiers/souffleur-souffleuse-de-verre
https://fedecristal.fr/presentation/
