Après des années de croissance, la consommation mondiale de nourriture biologique s’est effondrée depuis 2022. Un premier élément d’explication est l’augmentation des prix : l’inflation est passée de 1,6 % à 5,2 % en France entre 2022 et 2023. La deuxième donnée à prendre en compte est la crise de confiance des consommateurs, due notamment à l’industrialisation du secteur. Dans cette situation, il est essentiel de comprendre ce qu’est réellement le bio – et ce qu’il n’est pas — pour faire des choix éclairés. Car, si l’on pense souvent que manger bio rime avec écologie, éthique et raison, la réalité est parfois plus nuancée. Découvrez dans cet article ce qu’il faut savoir pour démêler le vrai du faux.

1. La nourriture bio est-elle naturelle ?

Les biopesticides : une réalité dans l’agriculture biologique

Il est courant de croire que les champs en agriculture biologique ne reçoivent aucun traitement. C’est faux ! Même ce secteur utilise des biopesticides, et il existe, selon un rapport de 2021, environ 50 substances autorisées en Europe. En pratique, cela signifie que les denrées achetées en grande surface ou en magasin spécialisé, portant le logo de la certification européenne, ont tout de même reçu un traitement herbicide, insecticide ou fongicide.

Naturalité et biodiversité : les limites du bio industriel

Toutefois, la composition de ces traitements diffère de celle utilisée en agriculture conventionnelle, car la matière active doit obligatoirement être d’origine naturelle. Malgré cette exigence, certains coformulants ou adjuvants, intégrés pour améliorer l’efficacité des formules, soulèvent des interrogations. En effet, la législation n’interdit pas que ces composants soient issus de produits de synthèse, ce qui peut poser des problèmes.

Par ailleurs, certaines molécules utilisées font l’objet d’études, car elles pourraient avoir un impact négatif sur la biodiversité. Ce dilemme met en évidence une contradiction : pour répondre à la nécessité de produire davantage, il devient inévitable d’éliminer certains insectes, ce qui éloigne encore davantage de l’idéal des origines de la culture dite naturelle. Alors si vous souhaitez éviter les substances controversées, vous pouvez apprendre la permaculture, qui prône un mode d’agriculture plus durable, en harmonie avec la nature.

2. La consommation d’aliments bio est-elle écologique ?

Produits bio importés : un impact écologique à double tranchant

Lors de vos prochaines courses, réalisez ce petit test : faites un tour au rayon bio de votre magasin et examinez la provenance des fruits et légumes sur les étals. Vous serez peut-être étonné (ou pas !) de constater que la majorité vient de l’étranger, notamment d’Espagne.

Eh oui, notre voisin est l’un des plus gros exportateurs de bio en Europe, et ce constat soulève un double enjeu. D’un côté, la pollution générée par le transport routier en France et dans le reste de l’Europe ; de l’autre, la problématique de l’eau. Pour limiter l’impact environnemental des exportations massives, privilégier les aliments produits localement est une solution.

Entre stress hydrique et plastique : les défis de la production bio en Espagne

De surcroît, l’Espagne est le pays le plus touché par le stress hydrique dans l’Union européenne. Depuis 2021, un quart de son territoire est placé en alerte chaque été en raison de réserves d’eau insuffisantes. Pourtant, ce pays reste le principal producteur et exportateur de tomates bio, avec près de 50 000 tonnes par an. Or, produire un seul kilo de ces fruits savoureux nécessiterait environ 50 litres d’eau, ce qui semble paradoxal dans une région gravement affectée par la sécheresse.

Outre la question de la consommation d’eau, l’utilisation massive du plastique pour cultiver sous serre tout au long de l’année pose plusieurs questions. C’est notamment le cas en Andalousie, où la province d’Almeria, surnommée la « mer de plastique », compte 30 000 hectares de bâches, dont près de 10 % sont certifiées biologiques. Ce mode de production interroge également sur la qualité des produits.

💡Savais-tu que des techniques ancestrales existaient pour économiser l’eau ? Si cela t’intéresse, tu peux lire l’article sur les Waru, Waru, un procédé qui a vu le jour au Pérou 3 000 ans avant notre ère.

3. Est-ce que manger bio signifie mieux se nourrir ?

La qualité d’un aliment peut se juger selon plusieurs critères : son goût, ses valeurs nutritives ou l’absence de toxicité. Par exemple, manger une tomate en décembre, cultivée sous serre en Espagne, peut décevoir gustativement. Ces tomates sont souvent récoltées avant maturité pour supporter le transport et arriver à point à la vente. Un reportage d’Arte a comparé trois paniers :

  • un conventionnel ;
  • un bio de supermarché ;
  • et un bio d’un magasin spécialisé.

La conclusion est claire : les produits biologiques présentaient une concentration réduite de résidus de pesticides. Cependant, aucune différence notable n’a été observée en matière de qualité nutritive. À noter que consommer des produits de saison reste le plus adapté aux besoins humains, comme les fruits et légumes riches en eau au printemps et en été. Vous pouvez également cheminer vers l’autosuffisance alimentaire en cultivant vos aliments pour mieux en contrôler la qualité et la provenance.

💡À lire aussi : les 4 conseils pour consommer plus local.

4. Les élevages biologiques respectent-ils le bien-être animal ?

Certifications bio : des règles strictes mais pas toujours suffisantes

Quand on fait le choix de consommer de la viande issue d’élevages biologiques, on imagine des bêtes à l’air libre, en bonne santé, se nourrissant d’herbes et de graines. Mais là aussi, la réalité peut être toute autre. Si le cahier des charges européen impose certaines règles strictes pour obtenir la certification biologique, cela ne garantit pas toujours le bien-être des animaux. Parmi ces règles figurent :

  • l’accès extérieur dès que les conditions climatiques le permettent ;
  • l’alimentation sans pesticides de synthèse ni OGM ;
  • l’interdiction des traitements préventifs par antibiotiques ;
  • le plafond de 3 cures d’antibiotiques par bête et par an en cas de maladie.

Entre mythe et réalité : les conditions de vie dans les élevages biologiques

Cependant, les rapports annuels de l’association ARIWA (Animal Rights Watch), publiés depuis 2019, font état de conditions de vie des bêtes stupéfiantes à l’intérieur de certains élevages, loin de l’imaginaire collectif attendu; Par exemple, les poules pondeuses sont souvent confinées dans des espaces réduits et surpeuplés, où beaucoup souffrent de blessures et de maladies. Les carcasses de celles qui succombent à ces conditions restent parfois à proximité des autres. De leur côté, les porcs sont contraints de vivre dans des environnements insalubres, au milieu de leurs propres excréments.

Un véritable scandale pour les consommateurs qui cherchent à adopter une consommation éthique !

Les elevages biologiques ne respectent pas forcement le bien-etre animal.

Source : https://www.ariwa.org/jahresbericht-2022/

Alors, est-il toujours judicieux de manger bio ? Sur le plan de la santé et de la planète, oui, mais, combiné à une consommation locale, de saison et raisonnée, c’est encore mieux. Ainsi, vous éviterez une partie des inconvénients évoqués dans cet article, comme la pollution liée aux transports, les fruits et légumes récoltés avant maturité, ou encore les problématiques de bien-être animal. Maintenant, à vous de jouer : partez à la rencontre de votre maraîcher local préféré, ou retroussez vos manches et produisez vous-même le contenu de vos assiettes, si cela vous tente ?

Faïza Bachir, pour e-Writers.

Article rédigé lors du cursus de formation en rédaction web chez FRW.

Article relu par Daphné Lemercier, tutrice de formation chez FRW.

Sources :

https://www.insee.fr/fr/statistiques/4268033#tableau-figure1

https://eur-lex.europa.eu/LexUriServ/LexUriServ.do?uri=OJ:L:2009:309:0001:0050:FR:PDF

https://www.miteco.gob.es/es/agua/temas.html

https://www.ariwa.org