À l’instar de la société, l’école est envahie par le stress. L’agitation et la nervosité sont le lot de beaucoup d’élèves. Il y a quelques années, des professeurs ont introduit des exercices de respiration et de relaxation dans leurs cours. Leur but était d’aider les élèves à mieux se concentrer en évacuant le maximum de stress. De nos jours, près de 270 000 enfants bénéficient chaque année de cette discipline psychocorporelle, de la maternelle à l’université. Le groupe de Recherche sur le Yoga dans l’Éducation (RYE) forme 500 éducateurs tous les ans partout en France. 80 % d’entre eux sont des enseignants. Agréée par le ministère de l’Éducation nationale en 2018, l’association RYE est de plus en plus sollicitée pour ses formations. D’où provient ce formidable succès du Yoga dans l’enseignement ? Dans quelles mesures apporte-t-il un correctif à l’agitation ? En quoi est-il bénéfique ?
L’importance du calme et de l’attention dans le processus d’apprentissage
La force du Yoga vient tout d’abord de sa capacité à préparer l’élève aux apprentissages. Comme l’affirme Philippe Filliot dans le documentaire sur la rencontre entre le yoga et le monde de l’éducation, « un des problèmes majeurs de l’école aujourd’hui, c’est l’attention ». Un constat largement partagé par les enseignants et les parents. Ce Docteur en Sciences de l’Éducation et professeur de yoga explique que pour apprendre, il faut être réceptif.
Dans un monde encombré d’informations de toutes sortes, être attentif et se concentrer est un défi. Le cerveau est soumis aux distractions et le mental est dispersé. Ce manque chronique d’attention nuit considérablement aux apprentissages. Or, la concentration ne peut être forcée. Elle survient quand on est détendu ou quand on accomplit un travail en profondeur.
Interviewée sur les débuts du yoga à l’école, Micheline Flak, la fondatrice de l’association RYE explique l’intérêt du yoga :
« Notre système répète « faites attention ! », « taisez-vous ! », « écoutez-moi ! », comme s’il était simple d’effectuer cet effort ! Le développement de l’attention et de la concentration est une entreprise et le yoga, discipline par excellence du corps et de l’esprit, offre des techniques pour rendre le mental actif et réceptif à la fois. »
Par son travail sur la conscience du corps et la conscience du souffle, le yoga favorise le calme et l’attention chez l’individu. Venu d’Orient (Inde, Égypte, Tibet), il est à la fois une sagesse et une méthode. Si le yoga cherche à unifier l’individu et à le recentrer, il offre aussi des techniques qui luttent contre la dispersion du mental. La racine du mot « yoga » vient du sanskrit « YUJ » qui signifie « unir, lier ensemble ». Le yoga consiste donc à harmoniser les différentes composantes de l’être humain. C’est pourquoi il est une discipline physique, psychique et spirituelle.
Pas besoin de tapis de yoga ou de salle spéciale pour éveiller le corps et prendre conscience du souffle en classe ! On peut pratiquer debout entre tables et chaises ou assis devant son bureau. Ce retour au corps, à travers la respiration et les mouvements, répond au besoin d’intériorité de tout individu. Progressivement, les élèves apprennent à développer leurs paysages intérieurs et à gérer leurs émotions.
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À l’origine de la Recherche sur le Yoga dans l’Éducation : Micheline Flak
Le succès du yoga dans la pédagogie scolaire tient également au fait qu’il s’est parfaitement bien intégré à l’école. L’association RYE a toujours tenu à transmettre un enseignement aussi bien authentique que laïque.
En 1968, Micheline Flak rencontre Swami Satyananda lors de sa première tournée en Occident. Elle devient sa disciple et pratique le yoga. Constatant les bienfaits de cette pratique, cette enseignante d’anglais à Paris intègre dès 1973 le yoga à son enseignement. À la même époque, Jacques de Coulon est instituteur en Suisse. Le mémoire de pédagogie qu’il vient de rédiger porte sur des exercices pratiqués par les élèves d’une école égyptienne de Californie. Lors de la présentation de son mémoire en 1976, il entend pour la première fois parler de yoga. Peu après, il rencontre Micheline Flak qui travaille sur les apports du yoga au monde éducatif. En 1978, il intègre le groupe de Recherche sur le Yoga dans l’Éducation.
L’objectif était de former des éducateurs aux techniques de yoga et de relaxation adaptées aux enfants et aux adolescents. Micheline Flak se souvient qu’à l’époque, même en Inde, on disait que le yoga était réservé aux adultes. En effet, le corps de l’enfant est en pleine croissance. Sa construction n’est pas terminée. Il a donc fallu adapter les postures aux spécificités physiques des jeunes. Il est possible de commencer dès l’âge de 3 ans avec des petites histoires et des comptines. Par contre, aucune consigne de respiration ne peut être donnée avant 7 ans.
À ceux qui se demandent si le yoga est compatible avec l’éducation laïque, les pionniers du RYE assurent qu’une compréhension profonde du yoga permet de le détacher de tout fond religieux. Le mot « éducation » signifie conduire hors des conditionnements. Une éducation laïque doit amener l’élève à réaliser ses potentialités. En menant graduellement au calme mental et à l’élargissement de la conscience, le yoga renforce cette éducation. Bénéfique à tous, il invite à la tolérance.
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Selon Micheline Flak, il est très important pour les stagiaires de connaître les origines des exercices. Pendant 2 ou 3 ans, les enseignements donnés en formation sont clairement reliés au yoga traditionnel. Il constitue en effet un puissant foyer d’énergie. Celle ou celui qui se forme doit donc être professeur de yoga. L’association est ouverte aux différentes formes de yoga. L’essentiel est que les professeurs soient certifiés et expérimentés.
Le yoga à l’école : de réels bénéfices
Améliorer les apprentissages en connectant le mental et le corps, tel est le but du yoga en classe. Mais ses effets dans l’éducation vont bien au-delà des résultats scolaires :
- Les enseignants constatent les bienfaits de cette pratique sur la concentration, la mémorisation et le travail en groupe. Tous prennent plaisir à exercer leur métier dans un climat calme et détendu.
- Les élèves reprennent goût au travail. Les relations entre eux ou avec les professeurs sont plus apaisées.
- Les parents remarquent des changements chez leurs enfants. Ceux-ci sont plus attentifs, moins agressifs ou moins timides en dehors de l’école. Savoir utiliser la respiration pour se calmer développe leur autonomie.
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Citant Swami Niranjananda, Jacques de Coulon explique que la réalisation de mouvements physiques ne repose pas uniquement sur le corps. Ils reposent aussi sur les émotions et le mental. Une posture d’équilibre comme celle de l’arbre, par exemple, développe l’équilibre tant au niveau physique que psychique. C’est une posture où l’on est debout sur un pied, l’autre pied sur la cuisse, les mains jointes au niveau du diaphragme ou au-dessus de la tête.
Cette posture est aussi très utile pour travailler la gestion de groupe avec des adolescents : avant un travail de groupe, l’enseignant propose 5 minutes de yoga pour instaurer un état d’esprit coopératif. Les jeunes doivent faire la posture de l’arbre ensemble, c’est-à-dire trouver l’équilibre à deux debout sur un pied. Ce qui n’est pas évident ! Cet exercice ludique les aide à lever les barrières psychologiques en s’appuyant physiquement les uns sur les autres.
Il y a une règle de base dans chaque exercice proposé aux élèves : c’est de respecter une gradation. Celle-ci passe par :
- le corps ;
- le souffle ;
- l’espace frontal ;
- le mental.
Il est difficile pour des élèves, par exemple, de se concentrer directement sur un schéma mathématique dessiné au tableau. Mais si vous leur dites : « prenez d’abord conscience de votre corps » ou simplement : « les plantes de pieds sur le sol ». Ensuite, « de votre souffle, vous observez votre respiration, par exemple, depuis votre nez ». Puis « prenez conscience de la lumière qui filtre à travers vos paupières fermées ». « Et maintenant, visualisez un rectangle avec ses angles droits rouges, etc. ». Ils pourront alors se concentrer mentalement sur les propriétés du rectangle. Le mouvement associé au souffle et la relaxation sont donc la base du Yoga dans l’Éducation.
Les neurosciences nous apprennent que le mouvement est un ingrédient quasi magique pour l’apprentissage. Quand nous sommes en mouvement, les facteurs neurochimiques déclenchent une sensation de plaisir qui nous permet de mieux apprendre. Une pédagogie qui intègre le mouvement est donc naturellement efficace. Avec la respiration consciente et la relaxation, les postures de yoga sont un réel soutien pédagogique pour les enseignants. Quelques minutes suffisent. Le yoga est bénéfique pour l’éducation, parce qu’il améliore au final la qualité de vie.
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Sources :
Interview de Sophie Flak par Émilie Trevert le 07/01/2018, pour le journal Le Point.
Interview de Jacques de Coulon avec Micheline Flak « Retour sur les débuts du yoga dans l’Éducation ». Site web de l’association RYE (Chronique des fondateurs).
MasterClass FRW avec Isabelle Canivet et Jean-Marc Hardy (la pédagogie NIRVANA)
Documentaire sur la rencontre du yoga et du monde de l’éducation ( Vidéo YouTube version longue)
Conférence de Jacques de Coulon sur le Yoga à l’école : « Pour le développement de l’attention et du calme chez l’élève » (Vidéo YouTube)
Clarisse Philippy pour e-Writers.
Article rédigé lors du cursus de formation en rédaction web chez FRW.
Article relu par Agathe, tutrice de formation chez FRW.