Chaussette orpheline ? t-shirt troué ? La tentation est grande de jeter son vêtement à la poubelle lorsqu’il est usé. Vade retro, c’est ce qu’il ne faut surtout pas faire ! On va aborder ici les alternatives qui existent :  vous êtes déjà tombé nez-à-nez avec une borne de recyclage le Relais ou encore aperçu une boutique Emmaüs sans vous être vraiment penché sur le sujet ? La filière textile et les associations essayent d’intégrer le recyclage dans votre quotidien, afin que cela devienne un réflexe pour tous. Est-ce du greenwashing ou un véritable sujet de société ? On fait le point sur le recyclage des tissus usagés, ses acteurs, et ses bonnes pratiques.

Recycler mes habits abimés, je veux bien, mais pour quoi faire ?

Des déchets textiles de plus en plus nombreux

La mode est un des secteurs les plus polluants au monde : selon une interview d’Erwan Autret, ingénieur à l’Agence de l’environnement (Ademe), réalisée en 2020 par le Parisien, l’industrie textile ferait partie des cinq plus gros pollueurs en termes d’émissions de gaz à effet de serre. Cependant, toujours selon Erwan Autret, « seule la moitié de l’impact carbone du textile serait due à la production, l’autre moitié serait liée à l’usage qu’en fait le consommateur ». À votre échelle de simple client, vous pouvez donc avoir un réel impact via des gestes simples.

Et ça commence par les vêtements dont vous ne voulez plus : sachez que 7,7 kg de vêtements par personne par an sont jetés à la poubelle ; ils finiront pour la plupart enfouis dans des décharges ou brulés. Pas très enthousiasmant n’est-ce pas ?

Des tissus réutilisables sous de multiples formes

Il existe plusieurs alternatives à la déchetterie : selon une étude commanditée par Refashion (éco-organisme du recyclage textile), 42 % des Français ont adopté le principe de la revente de vêtements et ce chiffre est en augmentation au fil des ans. Le don de vêtement reste tout de même le premier réflexe des Français : 80 % y ont recours lorsqu’ils se séparent d’un habit. Néanmoins, lorsque celui-ci est usé, ils sont moins enclins à se rendre à la benne : ils estimeraient que le don d’un vêtement abimé est irrespectueux.

Ce frein au don est dû à une méconnaissance des principes du recyclage textile : ⅓ des vêtements usés qui sont donnés seront transformés en nouvelles matières premières. Le recyclage des tissus usagés reste donc une alternative toujours préférable à la poubelle.

Chiffres sur le don de textiles

Le don est l’action de seconde vie textile la plus pratiquée. Infographie commanditée par Refashion, publiée par Fashion Network

Je souhaite me séparer d’un vêtement usé : quelles sont mes options ?

1. Les bornes de recyclage

La borne de recyclage est l’alternative la plus simple lorsqu’on souhaite se débarrasser d’un vêtement. Il existe environ 45 000 points de collecte en France, vous pouvez repérer sur Internet le plus proche de chez vous.

Dans ces bornes, vous pouvez déposer tous les textiles ou chaussures, même les tissus usagés ou déchirés, y compris les sous-vêtements. Le linge de maison, comme les serviettes de table, les draps, etc., est aussi éligible à la borne. La seule exception ? Les textiles ou chaussures ayant servi au bricolage ou ceux qui sont enduits de peinture. Ils peuvent contenir des produits toxiques qui empêcheront leur revalorisation et doivent être déposés à la déchetterie.

Lorsque vous amenez vos affaires à la borne, il y a un protocole à respecter.

  • Les articles doivent être placés dans un sac bien fermé et pas trop grand.
  • Les vêtements ne peuvent pas être humides, sous peine de générer de la moisissure.
  • Les chaussures sont attachées par paire et, si possible, séparées du textile.

Si le conteneur est plein, évitez de déposer vos sacs par terre : les vêtements risquent de s’abimer ; essayez plutôt de revenir dans quelques jours.

2. Les magasins solidaires

Vous aimez chiner et faire de belles découvertes en fripes ? Profitez-en pour déposer les affaires dont vous ne voulez plus dans des magasins solidaires (le label Emmaüs, Chez Henry par la Croix Rouge, etc.)

Vous ne pourrez pas gagner de l’argent grâce à vos vêtements, mais vous contribuerez à l’aide vestimentaire à destination des plus démunis et vous financerez les actions d’une association. Attention : ces magasins reprennent des habits qui sont en bon état ou seulement légèrement abimés (petit trou, tache peu voyante…). Si le tissu est trop usagé, on vous conseille de le déposer directement à la borne.

Sachez qu’il existe aussi des collectes organisées chez les particuliers, principalement en ville : les associations vous proposent de laisser vos vêtements dans le hall de votre immeuble et vous préviennent normalement quelques jours avant par une affiche.

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3. Les enseignes de vêtements

En plus des projets associatifs, les enseignes de vêtement elles-mêmes ont décidé de participer à la grande aventure du tri. Vont-elles réussir leur mue vers la slow fashion ?

H&M a été la première marque à proposer des bons d’achats en échange de dons de vêtements en 2013. De nombreuses autres enseignes ont suivi comme Bonobo, Mango, Cyrillus ; des acteurs de la grande distribution comme Carrefour ou Système U ont plus récemment aussi adopté ce dispositif. En 2020, dans son rapport RSE, H&M a annoncé avoir collecté 18 800 tonnes de vêtements en un an dans le monde ; les grandes enseignes seront également bientôt obligées de dévoiler les éco-scores de leurs vêtements.

Les modalités de recyclage changent beaucoup selon la marque. Par exemple, chez H&M, il faut donner au moins 5 articles pour bénéficier de 15 % de réduction. Renseignez-vous bien avant de vous rendre en magasin.

Ce dispositif de recyclage est avantageux d’un point de vue financier, mais il incite à la surconsommation, s’éloignant de l’état d’esprit écologique initial de la démarche.

Apportez les vêtements que vous ne portez plus et donnez-leur une seconde vie !

une affiche présente chez Zara à Paris pour promouvoir le recyclage

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Le recyclage des tissus usagés se fait-il dans de bonnes conditions ?

Le fonctionnement de la filière de recyclage en France

En 2009, une réglementation a imposé aux fabricants de textiles l’élaboration d’une filière de recyclage. L’éco-organisme Refashion est alors créé : financé en partie par les producteurs de textiles, il doit mettre en place une politique de prévention et de gestion du recyclage. Concrètement, il délègue les actions de tri et de revalorisation à des opérateurs conventionnés.

Il existe beaucoup d’opérateurs différents : vous pouvez déposer vos affaires dans des bornes le Relais, mais aussi des conteneurs Croix rouge, Ecotextiles, etc. Il y a même des acteurs uniquement régionaux, comme Syfadec en Corse. Cependant, seul le Relais est habilité à intervenir sur la totalité de la filière de recyclage.

Sur le terrain, comment ça se passe ? Une fois collectés, les vêtements seront triés en masse dans des centres spécialisés. Par exemple, les centres le Relais trient chaque jour 250 tonnes de textiles. La moitié des dons sera réutilisée ou revendue.

Un tiers des habits sont recyclés pour être transformés en matière première : ce peut être des fils pour créer de nouveaux vêtements ou des isolants, etc. Selon les techniques de recyclage (broyage, effilochage…), on obtiendra des résultats différents. Par exemple, 2 500 paires de chaussures recyclées peuvent se transformer en un court de tennis.

Les articles non recyclables et non réutilisables seront transformés en combustibles alternatifs. Seuls 0,4 % des déchets ne seront pas du tout revalorisés.

Pourcentage des textiles qui sont vendus ou recyclés

Où vont les textiles recyclés sur le réseau Relais ? source : le Relais

Cependant, tout n’est pas rose dans le recyclage : les dons qui sont exportés (environ la moitié de la collecte) finissent parfois par polluer les océans, notamment en Afrique, car ils ne trouvent pas preneurs.

Les projets innovants en matière de recyclage

La filière recyclage est en constante évolution, afin de pouvoir mieux prendre en charge les problèmes de pollution. Les pouvoirs publics ambitionnent de collecter 60 % des textiles en 2028, contre 34 % aujourd’hui. Dans ce cadre, des projets innovants voient le jour.

  • Les chaussettes orphelines : partant du constat que personne (ou presque) ne peut échapper au syndrome de la chaussette orpheline, la marque – qui est aussi une association – trie et recycle des chaussettes pour en faire de nouveaux articles de mode.
  • R-shape : l’équipementier sportif Nolt a mis en place un projet qui vise à collecter les anciens maillots des clubs de sport pour les revaloriser. Les vêtements qui ne pourront pas être recyclés seront broyés, fondus et transformés en coupelles de sport.
  • Les chaussures en déchets marins : le créateur Eugène Riconneau a créé la première chaussure en déchets marins, composée à 79 % d’éléments rejetés par l’océan. Le soulier est à la fois recyclé et recyclable.

Vous l’aurez compris : le recyclage des tissus usagés est important pour diminuer l’impact carbone de votre consommation. La filière est en plein essor et de plus en plus de textiles pourront connaître une nouvelle vie.  À vous de choisir maintenant la solution qui vous convient le mieux pour recycler vos habits ! Pour prolonger la démarche, penchez-vous aussi sur les principes de la mode écoresponsable.

Sources :

Refashion

Le Relais

Ministère de l’Écologie

H&M

Louise Sevin, pour e-Writers.

Article rédigé lors du cursus de formation en rédaction web chez FRW.

Article relu par Périne, tutrice de formation chez FRW